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Discours Mgr SIKULI-Butembo



Veuillez trouver ci-dessous le discours  d'ouverture 
de  S.E.Mgr  Sikuli  Melchisedech, évêque de Beni-Butembo au Symposium 
international sur la paix en Afrique, en date  du 27 fevrier 2001.
Bruxelles, 2 mars 2001
Paolo
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DISCOURS  D'OUVERTURE DE  S.E.Mgr  SIKULI  MELCHISEDECH
EVEQUE DE BUTEMBO-BENI
AU SYMPOSIUM INTERNATIONAL SUR LA PAIX EN AFRIQUE
EN DATE  DU 27 FEVRIER 2001



Chers Confrères dans l'Episcopat,

Chers Amis Représentants Légaux, Responsables et Pasteurs des Eglises sœurs 
en particulier l'Eglise du Christ au Congo, l'Eglise Anglicane et l'Eglise 
Kimbanguiste, engagées dans ce projet,

Autorités Politico-Administratives et Militaires,

Distingués Invités venus des quatre coins du monde en Pèlerins de la Paix,

Chers Amis de la Société Civile,

Révérendes Sœurs, Révérends Pères, Révérends Abbés, Révérends Frères,

Chers Amis Membres de nos Communautés de base, Piliers de l'organisation de 
ce grand jour,

Mesdames, mesdemoiselles, Messieurs,

C'est avec beaucoup de joie et d'émotion que je vous souhaite une 
participation active à ce Symposium International sur la Paix en Afrique 
(SIPA en sigle). La tenue de cette réunion à Butembo, ville enclavée, 
abandonnée à elle-même, est à la fois une providence et une sorte de pari. 
Et si nous avons accepté de le prendre, à la demande des initiateurs de ce 
projet, les amis de Bukavu et d'Italie, c'est parce qui la paix  représente 
un enjeu majeur pour nous tous. Contrairement à la guerre, la paix n'est 
pas un projet simple, mais au contraire une édification complexe, fragile 
et difficile à préserver : comme en témoignent nombre d'exemples, il est 
souvent plus facile de gagner la guerre que la paix.

Notre présence dans cette grande salle de fête est déjà une réussite. Nous 
pouvons dire  que les objectifs sont atteints ; faire la guerre à la guerre 
par la non-violence en rassemblant le plus grand nombre de gens et 
d'associations pour parler de la paix ; faire pression sur les institutions 
nationales et internationales en attirant leur attention sur le droit à 
l'intégrité territoriale, à la démocratie, à la dignité humaine, à la 
justice, à la liberté, à la paix pour le peuple congolais et pour les 
autres peuples opprimés en Afrique et dans le monde ; œuvrer  pour une paix 
et une réconciliation basées sur de nouvelles formes de solidarité, un 
esprit de partenariat et un équilibre dans les échanges. C'est dans cet 
esprit que je vous invite à reprendre avec moi cette exhortation enracinée 
dans la culture biblique : Shalom ! Shalom ! Shalom ! Oui, nous voulons 
respirer la paix, répandre la paix, travailler dans la paix, échanger dans 
la paix, construire dans la paix. Nous voulons changer les rapports de 
force en force des rapports, sortir du cercle infernal de la violence et de 
la vengeance, de la haine et du fanatisme pour faire triompher la 
réciprocité du partage, de la négociation et du dialogue. Comme il est bien 
souligné dans la Charte constitutive de l'UNESCO : "Les guerres prenant 
naissance dans l'esprit des hommes, c'est dans l'esprit des hommes que 
doivent être élevées les défenses de la paix." Nous voulons contribuer aux 
changements de mentalité, de comportement qui peuvent favoriser le 
glissement progressif d'une culture de la guerre vers une culture de la 
paix, le passage du militarisme, dont les effets néfastes et destructeurs 
se passent de tout commentaire, à la culture démocratique, des idéologies 
conquérantes, colonisatrices et mécanistes à l'esprit de concorde et de 
cohabitation pacifique.

Permettez-moi de vous inviter à vous lever et à observer une minute de 
silence durant laquelle nous allons tous et chacun honorer la mémoire de 
tous les héros de la paix et de toutes les victimes de la guerre qui, au 
Congo, dans la région des Grands Lacs, partout en Afrique et dans le monde, 
sont tombés sur le champ de bataille, dans les camps des réfugiés, dans la 
situation de déplacés de guerre ou dans leurs domiciles¼ Je vous remercie.
Cet acte de mémoire nous plonge au cœur même  du drame qui est le nôtre :

-       le drame des déplacés de guerre et des réfugiés sur leur propre sol 
(aujourd'hui, plus de 200.000 dans notre diocèse) ;
-       le drame des filles et des femmes violées, des villages entiers 
brûlés ;
-       le drame des pillages et des vols à main armée dans nos villages, 
dans nos cités et sur les routes insécurisées plus que jamais ;
-       le drame des arrestations arbitraires de la justice expéditive, de 
la complicité avec les forces du mal ;
-       le drame de la misère dans un pays aux richesses considérables, 
attirant les appétits de toutes sortes, bradées par certains de nos 
compatriotes et pillées sans honte par les seigneurs de la guerre ;
-       le drame des guerres fratricides dont les tristes événements à 
Bunia constituent une tendance lourde ;
-       Arrêtons-nous un instant sur le drame et le fléau des 
enfants-soldats en relisant un extrait du livre de Ahmadou Kourouma, - 
Allah n'est pas obligé - : "Quand on n'a plus personne sur terre, ni père, 
ni mère, ni sœur et qu'on est petit, un  petit mignon dans un pays foutu et 
barbare, où tout le monde s'égorge, que fait-on ? Bien sûr on devient un 
enfant-soldat¼,  pour manger et égorger à son tour : il n'y a que cela qui 
reste ! "

Devant ces drames, nous ne pouvons pas rester indifférents. Nous devons 
briser dans la dignité la loi du silence qui nous rend complices de notre 
propre asservissement. Nous devons nous ouvrir à la culture de la 
non-violence tout en restant fermes dans nos interpellations. Le testament 
laissé par Son Excellence Monseigneur Emmanuel KATALIKO aux Evêques et aux 
chrétiens d'Afrique est éloquent : " Nous devons parler, car le peuple 
souffre ; Nous devons parler aux Chefs d'Etat, il faut parler aux 
dirigeants. Nous devons adresser à l'Afrique un message de réconciliation 
et de paix."

Comment ne pas évoquer la mémoire de cet homme qui a marqué le monde par sa 
simplicité, son courage prophétique, son option préférentielle pour les 
pauvres, sa liberté d'esprit, son attachement à Dieu.

On peut dire sans se tromper que la ville de Butembo, les territoires de 
Beni et de Lubero qui vous accueillent aujourd'hui se sont construits 
autour de Monseigneur KATALIKO. Nous sommes dans la ville de Monseigneur 
KATALIKO. Qui parmi nous ne l'a pas vu prendre tour à tour la tenue de 
cantonnier, de maçon, de jardinier, de fermier, d'entrepreneur, 
d'éducateur, d'infirmier, d'animateur de la jeunesse, de modérateur dans la 
gestion des conflits, de voix des sans-voix, de promoteur de la culture, de 
patriarche, de pasteur zélé et infatigable ?Sa dernière œuvre réalisée 
pendant son exil forcé à l'Université Catholique de Graben dont il est le 
fondateur, à savoir un mur de soutènement de 200 mètres de longueur sur 3 
mètres de hauteur, est un monument exceptionnel qui rappelle l'esprit avec 
lequel il a travaillé parmi nous. Il a tout donné pour que nous soyons ce 
que nous sommes. Sa simplicité l'a rendu proche de chacun de nous et 
surtout des petits pour lesquels il s'est consumé jusqu'au bout. Il est 
mort debout, au travail et pour une seule cause : "la passion de Dieu et de 
sa vérité qui libère l'homme". (Jean 8:32). Il a vécu avec la base pour 
mieux sentir, porter ses aspirations et l'aider à les réaliser. Par son 
engagement total, il est l'honneur et la fierté de notre peuple. Il est la 
figure emblématique de ces acteurs de développement et faiseurs de paix qui 
ont choisi d'œuvrer quotidiennement dans l'ombre, loin de toute culture de 
l'apparence, de toute prétention arrogante. Avec lui, tous ces combats 
d'hier et d'aujourd'hui célèbres et anonymes pour la paix et le 
développement durable trouvent leur sens profond.

Devant son témoignage de vie inoubliable, nous avons appris que 
Evangélisation, Développement et Paix vont ensemble.  La paix est un enjeu 
très important pour baisser les bras, pour ne pas y investir le temps, 
l'intelligence, la réflexion, l'argent, les structures. Elle appelle une 
véritable mobilisation, un engagement de tout un chacun, tous les jours et 
à tous les instants. La paix exige justice et vérité, pardon et 
réconciliation, esprit d'entreprise, de sacrifice, de créativité et de 
construction.

Monseigneur KATALIKO a payé le prix fort de sa soif de la justice et de son 
courage de la vérité. Durant son ministère épiscopal, il a été deux fois 
relégué de force : à Bukavu, dans las années soixante-dix, pour avoir 
refusé les dérives du Mobutisme ; à Butembo, vers la fin de sa vie, pour 
avoir refusé de cautionner l'occupation et l'agression du pays, le pillage, 
les tortures, les massacres et l'humiliation des populations congolaises. 
Monseigneur KATALIKO nous a appris à refuser une paix de dupes : la paix 
est trop importante pour qu'on la brade. Il faut refuser la paix des 
cimetières, qui sera source de nouvelles déceptions et socle pour de 
nouvelles guerres. Il faut aider le peuple à ne pas sombrer dans la 
violence, en recherchant ensemble les voies et moyens d'une paix durable.

Comme l'a bien souligné Spinoza, "La paix n'est pas la simple absence de 
guerre, elle est une vertu qui a son origine dans la force d'âme." Force 
d'âme qui a poussé certains d'entre nous à vaincre la peur pour venir de 
loin en Pèlerins de la Paix. Leur présence parmi nous est le signe le plus 
fort de la solidarité entre les nations, au-delà de toutes interventions 
caritatives. Avec vous, nous ne nous sentons plus isolés, marginalisés, 
oubliés de l'histoire, sacrifiés sur l'autel des grandes considérations 
diplomatiques et du bavardage pharisaïque. Force d'âme aussi qui a mobilisé 
les gens localement, à Bukavu comme à Butembo et partout au Kivu, pour 
participer généreusement à cette fête de la paix. Leur engagement spontané 
est un cri fort : oui, le peuple congolais aspire de toutes ses forces à la 
paix ;  il est prêt à tous les sacrifices pour que les démons de la guerre 
soient vaincus, pour que le combat pour les droits humains et la démocratie 
retrouvent droit de cité . Les urgences sont là qui nous pressent : les 
déplacés de guerre et les réfugiés, les infrastructures détruites, l'Etat à 
reconstruire, l'alimentation à assurer, l'économie à remettre en marche, 
l'accès à la terre et le problème de la nationalité à réguler, la 
reconstruction d'une société déchirée par les haines, meurtrie dans son 
corps et dans son âme, et tout cela sur fond d'un dialogue inter-congolais 
à promouvoir. Il faut que la prévention de la guerre prenne le pas sur la 
réparation de ses ravages. Il faut , de l'intérieur comme de l'extérieur, 
arriver à créer ces moments privilégiés, comme aujourd'hui, où l'on peut 
suspendre provisoirement le temps pour penser l'avenir, pour penser la 
construction de la paix.

Comme le disait Georges Bernanos, " Les voies libératrices ne sont pas des 
voies apaisantes, des voies rassurantes. Elles ne se contentent pas de nous 
inviter à attendre l'avenir comme on attend le train. L'avenir est quelque 
chose qui se surmonte. On ne subit pas l'avenir, on le fait."


Dieu Tout-Puissant, qui de là-haut vois tout :
Tu es celui qui n'hésite pas à répondre à notre appel.
Tu es la pierre d'angle de la paix.
Aujourd'hui nous t'appelons pour une grande cause.
Notre monde est privé de paix.
Nous sommes sans cesse entourés de guerres et d'affrontements.
Nous avons besoin de paix.
Nous prions donc pour la paix dans le monde.
Que la paix règne sur nous, sur notre continent,
Sur cette région des Grands Lacs en feu et en sang,
Sur notre pays déchiré par la guerre.
Accorde la paix aux personnes, aux foyers et aux familles ;
Etends-la aux quatre coins du monde.
Que tes bénédictions soient abondantes
Sur tous ceux qui soutiennent la paix et luttent pour elle (Assise, 1986).
Sois avec nous durant ce Symposium International sur la paix en Afrique.
Donne à chacun la claire vision de ce qu'il doit faire
Et la force de l'accomplir.
Auteur  de la vie, gloire à Toi pour les siècles des siècles.

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Distribué par anb-bia


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Un homme meurt chaque fois que l'un d'entre nous se tait devant la tyrannie 
(Wole Soyinka, Prix Nobel litterature) *
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Everytime somebody keep silent when faced with tyranny, someone else dies 
(Wole Syinka, Nobel Prize for Literature)     *
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