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Amnesty International dénonce le commerce d'armes de l'Europe
Amnesty International dénonce le commerce d'armes de l'Europe
LE MONDE | 14.05.04 | 14h38
Bruxelles de notre bureau européen
Exemples à l'appui, l'organisation Amnesty International affirme, dans un
rapport publié vendredi 14 mai à Bruxelles, que de nombreux Etats européens
continuent de vendre des armes employées par leurs acheteurs dans des
conditions portant atteinte aux droits de l'homme ou à la sécurité
internationale.
Ainsi des hélicoptères d'origine française, fabriqués en Inde sous licence,
sont-ils livrés au Népal où l'armée les utilise pour tuer ou blesser des
civils. L'Espagne s'est engagée à fournir des équipements militaires aux
forces de sécurité en Colombie, alors que les droits de l'homme n'y sont
pas respectés. Des compagnies de navigation danoises sont autorisées à
transporter des armes vers des pays soumis à l'embargo européen, tels que
la Birmanie, la Chine ou le Soudan, où les droits de l'homme sont
systématiquement violés.
De même, le Royaume-Uni exporte des matériels vers la Chine, au mépris de
l'embargo. La technologie irlandaise en matière de blindés fait l'objet
d'une licence accordée à la Turquie, par l'intermédiaire d'une société
singapourienne. Une entreprise allemande de technologie fournit au
Turkménistan du matériel d'écoute et de surveillance, qui y est utilisé
pour la répression. Sont également mis en accusation l'Italie, les Pays-Bas
et plusieurs des nouveaux membres de l'Union européenne, tels que la
Slovaquie, la République tchèque, la Pologne.
LES LACUNES DU CODE DE CONDUITE
Les pays de l'Union européenne se sont pourtant engagés, en 1998, en
adoptant un code de conduite sur les ventes d'armes, à empêcher les
exportations qui pourraient contribuer à la répression interne ou
l'instabilité régionale. Amnesty International note que ce texte comporte
des "failles", des "ambiguïtés" et des "lacunes" dont profitent les Etats
pour se soustraire à leurs obligations. Elle demande que ce code soit
révisé au terme d'une consultation associant les organisations non
gouvernementales et que des mécanismes plus efficaces soient mis en place
pour assurer un meilleur contrôle des transferts de technologies, d'armes,
de personnels et de formation dans le domaine de la sécurité.
Elle s'inquiète également des effets des prochains élargissements de l'UE,
notamment à la Bulgarie et la Roumanie (prévus pour 2007), voire à la
Turquie, pays marqués par "de graves violations des droits de l'homme et
des pratiques insuffisantes en matière de contrôle des armements". Les
critères d'entrée dans l'Union devraient à l'avenir, selon elle, inclure
des clauses sur le contrôle des exportations de matériel militaire.
Amnesty appelle à l'adoption d'un traité international sur le commerce des
armes qui interdirait notamment la fabrication, la commercialisation, le
transfert de matériel pouvant servir à la torture et qui lutterait contre
la prolifération des armes légères et de petit calibre. "L'Europe à
vingt-cinq a la possibilité de devenir un porte-parole international plus
cohérent et plus efficace en faveur d'une évolution positive, déclare
l'organisation. Pour ce faire, il est indispensable que l'Union mette de
l'ordre dans ses propres affaires."
Les principaux pays européens exportateurs d'armes - l'Allemagne, la
France, l'Italie, le Royaume-Uni, la Suède - sont à l'origine d'un tiers
des contrats internationaux signés entre 1994 et 2001, souligne le rapport.
Thomas Ferenczi
. ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 15.05.04