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Rapport ANMDH sur Kisangani



Title: Rapport ANMDH sur Kisangani




Préambule ___________________________________________
                 
Donnes-moi la liberté ou donnes-moi la mort ; tel est le cri de détresse que pousse actuellement la population de la ville de Kisangani.
 Il est vrai que le droit à l'auto détermination d'un peuple ne s'acquiert qu'au prix  de mille sacrifices. Mais, lorsqu'on s'en tient au respect des droits fondamentaux de la personne humaine et aux valeurs démocratiques comme le dialogue, la compréhension mutuelle et la tolérance, la population sera épargnée des pratiques qui avilissent la dignité humaine.
 Bien que les atteintes à la vie, les enlèvements et disparitions forcées, les tortures, les arrestations et détentions arbitraires ne soient pas une nouveauté dans l'histoire de violation des droits de l'homme, cependant leur caractère systématique, répété et leur technique d'utilisation visent non seulement à faire disparaître momentanément ou définitivement certaines personnes, mais aussi  à installer un Etat d'angoisse, d'insécurité et de peur.
 On se rappellera que depuis les affrontements du 26 AOUT 1998, trois jours après l'occupation de la ville de Kisangani par les troupes rwandaises en passant par les trois guerres successives dans la ville, la population civile a payé le plus lourd tribut de la guerre.
 Dans ce document, '' les Amis de Nelson MANDELA pour la Défense des Droits Humains '', ANMDH en sigle, met à la disposition de l'opinion nationale et internationale le film des événements qui leur permettra de juger si ceux du 14 mai 2002 étaient une mutinerie, une insurrection ou une mise en scène.
       
Le présent rapport comporte trois parties, à savoir :
 
·        L'historique des événements ;
·        Les massacres et pillages de la population ;
·        Les analyses, considérations et recommandations.
 
 
 
I. HISTORIQUE _______________________________________
 
 
LA GOUTTE D'EAU QUI A FAIT DEBORDER LE VASE
 
Tout est parti de la signature par la Société-Civile de la Province Orientale de l'Accord cadre signé entre le Gouvernement et le Mouvement pour la Libération du Congo de Jean Pierre BEMBA. A cela s'est ajouté la protestation des ONG des droits de l'homme de Kisangani contre l'installation à Kisangani du Quartier Général de l'Alliance RCD/GOMA- UDPS et autres partis, en passant par les différentes déclarations faites par les représentants des ONGDH locales, lors du passage de la délégation des Ambassadeurs des pays membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies.
 
Le 03 mai 2002, M. Moïse NYARUGABO, porte-parole du RCD-Goma, restitue les travaux de Sun City et accuse le Gouvernement d'avoir utilisé la corruption pour débaucher les membres de la Société Civile. Il a pris à partie les membres de cette corporation d'être parti à Kinshasa à la recherche des postes ministériels.
 
Le 05 mai 2002, lors de l'émission « VIE ET SOCIETE » de la radio nationale (RTNC-KISANGANI), le Gouverneur échangeant avec M. TOENGAHO, expert de la Société-Civile aux travaux de Sun City, au sujet de « la légitimité de l'Accord cadre ». A cet effet, le Gouverneur a réitéré les propos de M. NYARUGABO et pour sa part, M. TOENGAHO lui rappela les différentes guerres qu'a connues la ville de Kisangani.
 
Le 11 mai 2002, le vice-Président de l'Assemblée Provinciale, M. ABIBU SAKAPELA, lors de l'émission « POINT DE VUE » de la Radio Télévision Amani (RTA) a proféré des menaces à  l'endroit des acteurs de la Société-Civile.
 
Dans toutes ces communications, les responsables du RCD étaient à court d'arguments pour justifier leur refus de signer ledit accord. Enervés par les interventions des acteurs de la Société-Civile sur le bien fondé de son adhésion à l'Accord, la nervosité et la terreur ont caractérisé leurs discours.
           
 
II. LES MASSACRES DE LA POPULATION
 
II.1. Que s'est-il passé ?
 
Le mardi 14 mai 2002, à 04 heures, la Radio Nationale est assiégée par un groupe de militaires qui se présente comme ayant fait défection à l'ANC-RCD. Dans leur discours, ils étaient déterminés à libérer la ville de Kisangani.

 
De ce fait, ils ont fait appel à la population et plus précisément aux groupes d'auto-défense de la Commune de Mangobo et ceux d'ailleurs en les instruisant de prendre des gourdins et autres armes blanches et descendre dans la rue pour bouter l'ennemi (militaires-ruandais) dehors, au motif que toute la population a souffert de l'emprise ruandaise.
 
A cet appel, la population a répondu massivement. Ainsi, à son passage, elle a pu rendre la justice populaire à quelques sujets ruandais.
 
A 09 heures de la même journée, une autre voix apparaît sur la même chaîne de la radio, celle de l'Inspecteur de la Police Nationale IBUKA, puis celle du Commandant de la 7ème Brigade a.i. IVON NGWIZANI, annonçant la maîtrise de la situation.
Curieusement, le passage à la radio de ces officiers de la police et de l'armée s'est fait sans échange des coups de feu entre militaires de deux camps opposés.
 
L'opinion se pose la question de savoir si pareille situation pouvait-elle se passer en douceur !
 
Dans la même matinée, le Commandant 7ème Brigade a.i. introduit le Gouverneur de la Province qui dans son message, a rendu responsable les acteurs de la Société-Civile en général et les militants des Droits de l'Homme en particulier, d'avoir orchestré cette mutinerie. En outre, il accusera publiquement les militants des droits humains comme ce fut le cas lors des évènements de mille collines de triste mémoire.
 
Sans transition, il a décidé de suspendre toutes les activités des mouvements associatifs dans le territoire sous son contrôle.
 
Menaces qui pèsent sur les militants des droits humains
 
Comme ce qui se dit tout bas s'entend tout haut, les rumeurs sur l'éventuelle élimination physique des militants des droits de l'homme, membres des ONGDH du Réseau Droits Humains (les AMIS DE NELSON  MANDELA pour la Défense des Droits Humains, GROUPE LOTUS et GROUPE JUSTICE ET LIBERATION) s'entendaient déjà dans certains milieux.
 
Le 15 mai 2002, un véhicule aux vitres fumées, sans plaque d'immatriculation, transportant des militaires ruandais et congolais a fait irruption au Siège de ANMDH (dans l'enceinte de la Paroisse Christ-Roi de Mangobo) où la Sentinelle a été soumise à un interrogatoire très serré sur les adresses du Staff de l'Association ; après, ils se sont dirigés au couvent de la Paroisse, situé dans la même enceinte que le Siège de l'Organisation, où ils ont mis le Couvent à sac.
 
Le Curé de la Paroisse, le Révérend Père XAVIER ZABALO, de nationalité espagnole, a été enlevé avant d'être sérieusement interrogé au sujet de ses relations avec ANMDH, sur les sources de financement de l'ONG, sur les adresses du Staff de ANMDH, les moyens de communication mis à leur disposition, Š
 
Le Vicaire de la Paroisse, le Révérend Père Guy VEREAGHEN, a reçu un coup de crosse sur le flanc qui lui a conduit à l'hôpital.
 
Des sources proches des Services de Sécurité, ont révélé qu'une liste reprenant les noms de certains acteurs de la Société Civile guide ceux qui sillonnent des maisons en maisons pour les enlever.
 
Depuis ce temps, les membres de ANMDH ont pris la précaution d'¦uvrer en clandestinité. Il sied de signaler que jusqu'au moment où nous couchons ces lignes, leurs maisons font l'objet de plusieurs visites de la part des hommes en uniforme et d'autres personnes non identifiées.  A titre illustratif ;
 
 
Cette situation n'épargne pas les amis membres d'autres ONGDH avec qui nous composons le Réseau Droits Humains de la Province Orientale. Il nous est difficile de donner le cliché exact de leur situation d'autant plus que chacun est dans sa cachette.
 
 
II.2. Le ratissage, massacre et pillage  des biens de la population
 
Le mardi 14 mai 2002, aux environs de 11 heures, les militaires ruandais associés à quelques congolais ont pris d'assaut la Commune de Mangobo, plus précisément les Blocs WALENGOLA, WALENDU, BASOKO et MATETE. Ces derniers sont entrés d'une maison à une autre semant la mort, pillant, violant ; Š
 
Ci-dessous quelques cas illustratifs :
 

NOMS ET POST-NOMS :
SEXE :
ADRESSES :
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
11.
12.
13.
14.
15.
16.
17.
18.
Caty KASE
MBUTU Beatrice
Godelive OSESELA
Bernard BOKOTA
Vicky
Thomas MAMBAMBU
Raymond TENDA
Camille
BOKETSHU
Placide MBENZA
LIKUNDE
Billy
Berton
John
NGAMBI Gaby
Dominique KOMBA
NYEMBO
LIFAFU
F
F
F
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
M
Bloc WALENDU, n°89
Bloc WALENDU, n°59
Bloc BABALI, n°124
Bloc WALENDU, n°18
WALENDU,n°34
WALENGOLA,n166
WALENGOLA,n°172
Av.FATAKI,n°51, Bloc MATETE
Policier.
Camp ONATRA
5èmeAv.Tshopo
Résidant C/Lubunga
Policier(BSRS)
Bloc BASOKO,n°106
Commandant Urbain Police
Commandant au détachement Police
Commandant Camp QG
Sans adresse.
 
 
A cette liste, il faut joindre plusieurs corps retrouvés à la surface de la rivière Tshopo du 18 mai 2002 à ce jour. Sur ce, le présent rapport sera objet d'amélioration en nombre des victimes au fil du temps.
 
Dans l 'après midi du mardi 14 mai 2002, un communiqué radio diffusé appela tous les policiers de Kisangani à la parade à l'Etat Major de la Police Nationale. Une fois la mise en place terminée, ils seront brutalement mis en état d'arrestation.
 
Selon nos sources, plusieurs véhicules à bord desquels ces policiers ont pris place ont été conduit au pont Tshopo pour exécution. Parmi eux, on pouvait voir certains ligotés et les autres mains libres. Cette opération s'est déroulée entre 20heures 30minutes à 23 heures 40minutes, après avoir suffisamment assiégé ce pont.
 
Le lendemain matin, l'accès au pont comme au rond-point menant à ce pont était scrupuleusement interdit aux passagers. De loin, on pouvait voir les militaires nettoyer le pont  à eau et à sable afin d'effacer les traces du sang. Non loin du pont, sur la rive droite de la rivière Tshopo, on avait remarqué une flaque du sang humain. L'accès à ce pont n'a été autorisé que tard dans l'après midi.
 
Jeudi 16 mai vers 13 heures, un pêcheur a déclaré avoir trouvé dans son filet un corps humain égorgé. Vers 13 heures 30minutes, plusieurs corps humains ont fait irruption à la surface de la rivière Tshopo. Certains avec les têtes et les autres sans têtes, ni certains organes. Presque tous les corps étaient éventrés.
 
Alertés, certains observateurs de la MONUC se sont dépêchés sur le lieu, avant l'ensevelissement par les volontaires de la Croix Rouge locale.
 
Dans les mêmes après-midi, les militaires se sont rendus sur place et ont tiré en l'air pour disperser la population qui s'y est rendu  pour l'identification probable des cadavres.
 
Cette sale besogne est l'¦uvre des militaires dont la majorité était des ruandais, venus de Goma le même jour du soit disant mutinerie.

 
Pillage et vol des biens de la population
 
Comme signaler ci-haut, lors des représailles, les militaires extorquaient presque tous à leur passage. A titre exemplatif :
 
 
Témoignages et interviews
 
      Nous avons reçu plusieurs témoins dont voici quelques cas :
 
 
 
ANALYSES, CONSIDERATIONS ET RECOMMANDATIONS
 
Des yeux des observateurs, il apparaît qu'après les représailles de l'armée sur la population civile de la ville de Kisangani, les autorités ont  dû se rabattre sur les services chargés d'assurer le maintien de la tranquillité dans la ville et surtout celui chargé de renseignement.
 
L'acharnement des militaires de l'Armée Patriotique Ruandaise (APR) à commettre ces exactions tant sur le pont de la rivière Tshopo que dans la Commune de Mangobo, où ils ont été bien identifiés, serait dû au motif de la vengeance de trois sujets ruandais abattus dans la matinée.
 
On pense encore à un correctif à l'endroit de la population qui n'adhère pas à la cause du RCD-Goma (l'après Sun City ) et surtout au musellement de la Société-Civile en général, au mouvement Droits Humains en particulier, empêcher également la tenue du SYMPOSIUM INTERNATIONAL POUR LA PAIX.
 
De ce qui précède, les AMIS DE NELS ON MANDELA pour la Défense des Droits Humains recommande :
 
Au RCD-Goma ;
 
·        D'éviter une nouvelle guerre à Kisangani ;
·        D'ouvrir une enquête en vue d'établir la responsabilité de chacun dans cette «MUTINERIE» ;
·        De traduire en justice les responsables de ces actes ;
·        De démilitariser la ville de Kisangani (Cfr. Résolution 1304 du Conseil de Sécurité des Nations Unies).
 
Au Conseil de Sécurité des Nations Unies ;
 
 
A la population ;
 
 
Fait à Kisangani-Kinshasa, le 22 mai 2002.
 
Les Amis de Nelson MANDELA
 
Robert ILUNGA NUMBI, Président National ;
 
Jean KABANGU TSHIONDO, Coordonnateur de Kinshasa ;
 
Franck BANZA NGOY, Secrétaire Exécutif de Kinshasa ;
 
Marie-Thérèse KALONDA, Secrétaire-Assistante (KINSHASA)
 
ANNEXE _____________________________________________
 
Complément du Rapport sur l'exécution et le pillage du 14 mai 2002 à Kisangani
 
 
I.                    Officiers militaires et de l'armée exécutés ;
 
1. Commandant YUGO, non autrement identifié ;
2. Commandant MANGBAU ;
3. Commandant NYEMBO, Commandant Quartier Général ;
4. Commandant titulaire  du Bureau P3, non autrement identifié ;
5. Commandant du marché central de Kisangani Dominique KAMBA MUKUNJI.
 
II.                  Les officiers disparus;
 
1.     Commandant BANELE ;
2.     Commandant DONNANT ;
3.     Commandant MAKONGA Olivier ;
4.     Commandant LIKUNDE ;
5.     Commandant MUNGANGA, du bureau P4 (police nationale congolaise) ;
6.     Commandant Jean Marie ;
7.     Commandant Chef du Personnel Adjoint de la Police Nationale ;
8.     Commandant du Commissariat de la Police Commune Makiso ;
9.     Commandant MAMBE, de la Police Spéciale des Frontières ;
10. Commandant TABU, Secrétaire Général de la Police Nationale ;
11. Commandant NYAMU.
 
III.                Ont été libérés le dimanche 19 mai 2002 ;
 
1.      Commandant KIZUNGU de la PSRS ;
2.      Commandant ILANGI, Chef du Personnel de la Police Nationale ;
3.      Commandant NGONGO ;
4.      Commandant MUPENDA, Inspecteur au Camp d'Instruction de KAPALATA ;
5.      Commandant Martin ONDEKANE, malade suite aux traitements subis.
 
IV.               Différents  points d'exécution ;
 
 
Fait à Kisangani, le 29 mai 2002
 
Les Amis de Nelson MANDELA







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