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Iteka - Lettre ouverte
Veuillez trouver ci-dessous la lettre ouverte de ITEKA sur les violences et
la période de transition au Burundi.
Nous remercions les services Africa-Infodoc de nous l'avoir transmises.
Paolo - anb-bia bruxelles 17/03/2001 - 10:15
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Lettre ouverte de la Ligue Burundaise de Droits de l'Homme "ITEKA"
Objet : Les violences et la période de transition au Burundi
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,
Messieurs les candidats à la Présidence et à la Vice-Présidence de la
République pour la période de transition,
Messieurs les Présidents des Partis politiques,
Messieurs les Représentants des mouvements FNL et FDD,
Plus de six mois après la signature de l'accord pour la paix et la
réconciliation au Burundi et à la veille d'une nouvelle rencontre à Arusha
entre les parties signataires, le Burundi reste livré à une violence armée,
recrudescente depuis deux mois. En dépit des efforts sans doute réels
déployés par le Vice-Président et le facilitateur sud-africain pour amener
les groupes rebelles burundais à la table des négociations, rien ne semble
clairement indiquer, tant sur la scène politique que sur le terrain des
opérations militaires, un fléchissement de la logique de guerre en faveur
d'une logique de dialogue. Les derniers développements de la guerre
observés notamment dans la zone urbaine de Kinama et dans les provinces de
Gitega et Makamba le démontrent à suffisance. En l'absence actuelle de
toute perspective claire d'avancée vers un cessez-le-feu, le risque est
donc réel que l'année 2001 s'enfonce - comme sinon plus que les années
précédentes - dans un enlisement militaire et, partant, dans une
détérioration continue des conditions sociales et économiques d'existence
des Burundais.
C'est dans ce contexte que surviendra la prochaine réunion d'Arusha qui a
inscrit à son ordre du jour la désignation des responsables qui exerceront
les fonctions de Président et de Vice-Président du Burundi au cours d'une
période de transition de 36 mois. Depuis plusieurs mois et aux grands
dépens des préoccupations sociales profondes de la majorité des Burundais,
le débat politique a été détourné et confiné par les politiciens sur
l'unique question : " Qui présidera le Burundi durant la période de
transition ? "
En plus de six mois de querelles, de campagne, de tapage et d'impasse sur
cette étroite question, les Burundais ont rarement eu l'occasion de
recevoir des protagonistes politiques des informations et des explications
précises sur :
- la lecture qu'ils font des défis et enjeux spécifiques de la
période de transition ;
- le contenu, la pertinence, le pragmatisme, l'équité et la
spécificité des politiques sécuritaires, sociales, économiques,
internationales et sous-régionales qu'ils entendent mettre en œuvre pour
faire entrer le quotidien des Burundais dans une véritable transition vers
un changement positif.
De surcroît, telle qu'arrêtée à l'issue du sommet d'Arusha du 26 février
dernier, la formule pour le " partage du pouvoir " pendant les 36 mois de
cette transition ouvre la possibilité d'un retour à une " cohabitation
politique " périlleuse entre des tendances politiques (G7 et G10)
antagonistes. Tout au long des 26 mois que durèrent les négociations qui
conduisirent à l'accord d'Arusha, l'esprit de ces pourparlers a constamment
été miné par la volonté affichée de part et d'autre d'être continuellement
reconnu et accepté par sa " base ethnique " comme le champion de la défense
des intérêts de son groupe ethnique, au détriment de la recherche constante
du compromis courageux et constructif. Au regard de la dynamique bipolaire
qui a caractérisé les négociations d'Arusha jusqu'à la signature de cet
accord, accompagné de maintes réserves de part et d'autres, au regard des
divergences qu'accusent le G10 et le G7 sur des questions aussi sensibles
que l'arrêt des violences et la justice transitionnelle, des garanties
sérieuses et concrètes doivent être présentées aux Burundais contre tout
risque de retour à une " cohabitation politique " qui ramène les Burundais
à un Exécutif paralysé par des antagonismes vifs et une absence de cohésion
aggravée par la volonté et le souci démagogiques de chaque partie de "
flatter " et de contenter sa base et ses extrêmes.
Les Burundais attendent de la période de transition qu'elle imprime une
nouvelle dynamique au processus de paix en apportant enfin des réponses
concrètes et efficaces aux questions primordiales : la cessation rapide
des violences armées, le redressement urgent de l'économie du pays et des
conditions de vie sociales de la population, l'œuvre de réconciliation par
la vérité et la justice transitionnelle. Il serait tragique qu'au lieu de
cela, ils se retrouvent gouvernés par des leaders qui se paralyseront
mutuellement en refusant d'assumer les devoirs et les sacrifices
inévitables de toute " cohabitation ". C'est pour cette raison que la Ligue
ITEKA revendique haut et fort le droit des Burundais d'obtenir de tous les
candidats à la Présidence et à la Vice-Présidence de la période de
transition les garanties de leur capacité et de leurs aptitudes :
- à engager les Burundais dans une véritable " transition sociale "
vers un changement de leur quotidien ;
- à défendre - dans la pratique - des principes élémentaires communs,
des politiques et des stratégies communes face aux urgences de la Transition.
Ces candidats et leurs mouvances politiques respectives doivent entrer au
gouvernement pour gouverner pour la paix, et non entrer au gouvernement
pour s'opposer sur la paix et offrir le spectacle désolant d'une foire
d'empoigne.
La Ligue ITEKA est particulièrement préoccupée par le fait que cette
confusion et ces risques de cohabitation périlleuse surviennent au moment
où, outre l'absence de progrès dans les contacts avec les groupes rebelles
en vue d'un cessez-le-feu, les risques d'intensification de la guerre se
révèlent de jour en jour plus réels. Plusieurs faits le démontrent : les
événements récents de Kinama, les possibilités d'alliance entre les FNL et
les FDD, les mouvements de rebelles observés dans le Centre, le Sud et
l'Est du pays, l'éventualité du repli sur le Burundi des forces rebelles
burundaises et rwandaises opérant en RDC sous la poussée des progrès
heureux de l'accord de Lusaka, etc. Ces risques ne font que rendre encore
plus impératif qu'hier la cohésion du Gouvernement sur le choix des mesures
à prendre pour faire face avec efficacité à la situation.
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,
Messieurs les candidats à la Présidence et à la Vice-Présidence de la
République pour la période de transition,
Messieurs les Présidents des Partis politiques,
Messieurs les Représentants des mouvements FNL et FDD,
Si nous vous adressons collectivement cette lettre, c'est parce que
l'évolution du processus de paix au Burundi dépend en grande partie de
votre aptitude à vous accorder sur le respect des principes et des règles
élémentaires d'un " projet de survie " du Burundi. Vos itinéraires, vos
expériences de la vie, vos préoccupations et vos fréquentations
quotidiennes différentes fondent sans doute votre droit à des visions et
des opinions différentes quant à la manière de promouvoir la paix, la
justice et le développement démocratique, social et économique au Burundi.
Mais jusqu'à quel point, quand un pays et un peuple se désagrègent ? Devant
les risques de chaos qui continuent à guetter le Burundi, vous assumez une
responsabilité partagée : celle de choisir des décisions de compromis et de
les assumer, serait-ce en acceptant des risques partagés. Le peuple vous
tient aujourd'hui et vous tiendra demain encore responsable, chacun, tant
des paroles que des actes publics d'ouverture et de bonne volonté que vous
n'aurez eu ni la lucidité ni la force ni le courage de poser pour son
intérêt suprême. Nous en appelons à votre conscience.
S'agissant de la cessation urgente des violences, nous appelons le
Gouvernement et les groupes rebelles à poser chacun des paroles et des
actes publics de bonne volonté qui créeraient un climat de confiance
propice à leur rencontre physique et leur entente rapides sur un cessez-le-feu.
Concernant la mise en place des institutions de la Transition, nous
invitons tous ceux qui aspirent à sa conduite à se préoccuper d'abord de
gagner la confiance du peuple - et pas uniquement de leurs semblables
ethniques - en faisant la démonstration de leur aptitude à imprimer un
véritable changement positif et engager le quotidien des Burundais dans une
véritable transition vers ce changement.
La Ligue ITEKA, pour sa part, s'engage à mener tous les contacts et les
initiatives concrètes nécessaires pour faire dominer la logique du dialogue
sur celle de la guerre et pour promouvoir plus d'esprit de compromis chez
les parties en conflit. Egalement, elle œuvre et continuera à œuvrer en
faveur d'une plus grande prise en compte des intérêts de la population
burundaise et d'une plus grande participation de celle-ci aux orientations
du processus de paix.
Fait à Bujumbura, le 16 mars 2001
Pour la Ligue ITEKA a.s.b.l.
Pie NTAKARUTIMANA
Président
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x - Un homme meurt chaque fois que l'un d'entre nous se tait devant la
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