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Sud-Kivu: documents



Veuillez trouver ci-dessous copie d'une lettre ecrite a S.E. Mgr Ngabu, Eveque de Goma (Sud-Kivu, Congo RDC) et une declaration du College des consulteurs de Bukavu (Sud-Kivu).
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Son Exc. Mgr KATALIKO
Archevêque de Bukavu
B.P. 3324 Bukavu (Kivu)
République Démocratique du Congo


A son Excellence Mgr Faustin Ngabu:
Objet: Réponse aux messages me transmis
par Son Exc. Mgr Ngabu

Excellence Monseigneur,
Veuillez me permettre, cher confrère, de vous livrer ces quelques impressions après votre visite inattendue du Vendredi10 Mars 2000, dans mon lieu de refuge au diocèse de Butembo-Beni. Comme vous l'aurez sans doute constaté, j'en étais fort réconforté, me souvenant que celui qui visite un prisonnier ou un malade répond, donne un visage à l'amour de Dieu selon l'appel de Mt. 25 qui devrait toujours être la mesure des nos actes quotidiens, le schéma essentiel de notre examen de conscience (Cfr Redemptor Hominis, n°16). Vous voudrez donc bien accepter mes remerciements pour cette sollicitude particulière que vous avez bien voulu me témoigner.

Ces derniers temps, vous le devinez bien, je suis amené à beaucoup méditer sur la vie que mena, pendant quelques temps Jésus, fuyant ses ennemis peu avant son arrestation. Jésus préféra ne point parcourir la Judée où les juifs cherchaient à le faire périr (Cfr Jn 7:19;11;54;57;12;36). J'essaie d'imaginer ce que furent ses sentiments pendant cette période où, traqué, il sait que, s'il vient à être repéré, l'issue sera fatale. Vieille histoire, dira-t-on. Pourtant, hélas, c'est devenu relativement facile aujourd'hui, d'être exclu ou conduit à l'exil, même dans son propre pays.

A mon retour de Kinshasa, où j'étais parti participer au Comité permanent des Evêques de la République Démocratique du Congo, session du 31 janvier au 5 février 2000, à laquelle vous n'aviez pas pu prendre part, j'étais rentré par Goma, via Nairobi-Entebbe, le 12 Février 2000. Comme d'autres passagers en transit pour Bukavu, je n'étais pas sorti de l'aéronef. Les services de sécurité avaient demandé nos cartes d'identité. A ma grande surprise, mes papiers étaient retenus, sans explication. Quelques instants après, notre avion était entouré de militaires rwandais dans une Jeep et de militaires congolais sous le commandement d'un certain Tshapul. Le personnel de TMK me fit savoir l'énervement des autorités en place, exigeant qu'on me remette soit à Entebbe soit à Nairobi. J'avais compris mon sort. Mais je préférais retourner dans mon diocèse d'origine où je me trouve jusqu'aujourd'hui.

Je dois l'avouer: ce temps d'éloignement de mon Archidiocèse, dont je me sens plus que jamais solidaire, et dont je sens plus que jamais la force de communion de prières, me permet de relire les exigences de ma charge pastorale, d'y discerner de nouveaux appels en cette période difficile de notre histoire.

Le Christ, le premier, a payé le prix fort de son engagement pour nous. Il a été crucifié à cause de la perversité humaine qui n'a pas supporté la vive lumière (Jn 3, 19) projetée, par son être et sa parole, sur le coeur de l'homme. Cela ne peut que nous entraîner, surtout quand il nous invite à mettre, comme Lui, nos mains dans les plaies de l'humanité blessée. Chercher la vérité du Christ c'est, dans ma situation actuelle, me décider à vivre, comme Lui, dans l'amour et à me battre comme Lui encore, contre la violence du péché qui divise, jusqu'à donner ma vie, s'il le faut, pour ceux que j'aime. Option téméraire sans doute, dont la radicalité ne manque pas de m'effrayer et me faire douter de ma capacité à la mettre en oeuvre par ma seule force.

Ce temps de carême me donne particulièrement l'occasion d'une traversée sereine du désert, confiant que la croix ne constitue pas un but. Elle est seulement que l'esprit nous permet d'assumer avant de nous faire connaître la joie de la résurrection. En définitive, << Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? >> (Cfr Rm8: 31-39)

Excellence, si je suis quelque peu forcé à cet éloignement, c'est, je l'espère bien, à cause de mon <<Message de Noël 1999>> aux chrétiens de mon archidiocèse, dont maintenant l'opinion internationale est saisie et qui n'a rien d'incendiaire. N'en déplaise à ceux qui lui prêtent des intentions diaboliques, c'est un message d'espérance qui en appelle à la conversion de tous pour voir en face nos malheurs, pour sortir du marasme socio-politique qui nous plonge dans la misère sans nom qui ne fait que s'aggraver

. Au moins pour ceux qui auront lu ce message sans parti pris idéologique, ils conviendront avec moi qu'il va dans le même sens que celui de l'Assemblée de l'ACEAC à Nairobi: << Vous êtes tous des frères >> (Mt 23,8): arrêtez les guerres ! (du 12 au 15 Novembre 1999). A ma connaissance, aucun des évêques signataires de ce dernier test n'a été taxé de tribaliste ou d'obstacle à la réconciliation nationale.

Curieusement, dans le message me transmis, par votre médiation, de la part de Mr le Président Ilunga, branche RCD/Goma, l'aspect de conversion et de réconciliation de mon message, a été occulté. Quel rapport direct établir ce message élaboré dans un contexte précis d'un peuple écrasé, meurtri et humilié pour des mobiles idéologiques nébuleux et mon passé comme ancien pasteur de Butembo-Beni? L'essentiel des messages me transmis et que vous avez eu la bonne diligence de me répercuter, consiste, preuve à l'appui que << Mgr Emmanuel Kataliko, Archevêque de Bukavu, précédemment évêque Diocèse de Butembo-Beni, constitue un obstacle majeur à la réconciliation nationale et au règlement des Conflits inter-ethniques, dans la mesure où il se pose comme le héraut du refus de la cohabitation pacifique entre les ethnies du Kivu, composantes de la Communauté nationale congolaise>> (Rapport vous transmis, p.2)

Excellence, il me semble que tous les motifs établis à ma charge pour confirmer ce préjugé, sont délibérément forcés et faussés. Après bientôt 34 ans de service pastoral comme évêque de l'Egilse du Congo, dans ce Kivu jadis pacifique, ces accusations abusives ahurissantes me semblent relever de la mauvaise foi, de la manipulation idéologique perverse de ceux qui, comme on le dit, pour noyer leur chien, l'accusent de rage.

Pour le moment donc, c'est mon histoire personnelle, mon engagement pastoral et la cohésion inter-ethnique du diocèse de Butembo-Beni qui semblent être des obstacles majeurs au projet de rassemblement du RCD/Goma.

Les informateurs du RCD/Goma m'accusent de tribaliste, entre autres, pour avoir transféré le siège épiscopal de Beni à Butembo. Pour votre information, Mgr Ngabu, et bien que n'ayant plus la responsabilité du diocèse en question, je voudrais vous confier ces données disponibles dans ses archives.

Le premier Evêque du diocèse de Butembo-Beni, Mgr Henri Pierrard, a été sacré à Mulo en 1938. C'était à cette époque, le centre du diocèse et était envisagé comme siège épiscopal par le décret de Rome. C'est suite à l'évolution très rapide du diocèse que Mgr Henri Pierrard était venu s'installer à Beni-Païda, laissant la paroisse de Mulo comme centre de formation professionnelle des enseignants.

Depuis les incidents graves dont il avait souffert en1964, Mgr Henri Pierrard avait sollicité de Rome le transfert du siège épiscopale à Butembo. Moi même, son successeur, j'ai été sacré le 11 Octobre 1966, deux ans après les démarches de transfert de ce siège. L'acte de transfert fut signé le 7 Février 1967, soit quatre mois après mon sacre comme évêque!

Pendant les 31 ans que j'ai passés comme pasteur de ce diocèse, le déplacement du siège épiscopal n'a jamais fait problème. Sauf, sans doute , pour ceux qui connaissent mal son histoire et l'esprit des peuples qui le composent, qui n'ont nullement la culture du repli identitaire ou des conflits ethnocentriques mesquins ou meurtriers.

Butembo se situe sur la lisière entre les territoires de Beni et de Lubero. Ces deux territoires ne sont pas habités que par les Nande. Y vivent aussi, des Batalinga, Balese, Bakumu, Baserume, Bapere, Babumba, Bapakombe, Babira, Bambuti,... mais aussi d'autres tribus congolaises, toutes confessions confondues. Dans le territoire de Lubero, ont cohabité Nande, Hutu et Tutsi que j'ai moi même baptisés ou confirmés, comme dans la paroisse de Luofu. Le centre scolaire adventiste de Rwese-Lukanga a accueilli, pour leurs études secondaires, des tribus venant de toutes les provinces du Congo, et même de Hutu et Tutsi du Rwanda, sans qu'il y ait eu de tensions liées une quelconque appartenance ethnique ou tribale.

Le diocèse de Butembo-Beni n'a jamais connu le malheur de la haine interethnique comme cela est entretenu dans certains pays ou régions voisins. Le mélange, la cohésion entre les différentes tribus de deux territoires sont le secret de son dynamisme mutuellement reconnu et qui fait sans doute des jaloux.

Pendant 31 ans, je m'étais investi, non seulement dans la pastorale des âmes, mais aussi dans la promotion des oeuvres sociales, au profit de tous, sans distinction confessionnelle. J'ose affirmer, en toute bonne conscience, que le diocèse de Butembo-Beni peut être classé parmi les modèles de cohabitation et d'hospitalité pacifiques. S'il appert que le commerce soit << monopolisé>> par les Nande, cela relève de la compétitivité, de l'initiative privée, de l'esprit de risque et d'entreprise et nullement d'une discrimination ethnique supposée. Affirmer unilatéralement que cela relève de la logique d'exclusion qui caractériserait certains, est simplification abusive, une calomnie. Pour ne citer qu'un exemple. Les grands entrepreneurs de Beni ne sont pas que des Nande. Le terme << Bakuyakuya>> (mot swahili!) dont on m'attribue la paternité est un mot vulgarisé par les politiciens et qui est employé partout au Congo. En lingala, ce jargon qui n'est sans doute pas ethniciste, est rendu par <<Bauta>>. Faut-il forcer les faits pour le besoin de la cause (et pour quelle cause?) ?

Comme déjà indiqué au début de cette lettre, j'étais parti à Kinshasa pour participer aux assises du Comité Permanent des évêques de la RDC. Mon ticket de retour Kinshasa-Nairobi était pour le 10 Février 2000. Qui pourrait fournir des preuves, avec date à l'appui, que j'ai vu Mr Kabila et ses partenaires, ou encore que j'étais parti animer les CPP? C'est de la pure affabulation.

Pour terminerr cette plaidoirie déjà assez longue, je voudrais inviter les informateurs du RCD/Goma, auxquels je pardonne de tout coeur, de ne pas tordre la réalité pour se façonner des ennemis supposés.

Permettez, Excellence, que j'ajoute un mot sur la réalité pastorale de l'Archidiocèse de Bukavu. J'estime la rencontre détendue du 8 Mars 2000 que vous avez eu avec mon vicaire général, Mgr Gwamuhanya, après votre retour de Kigali, avait été suffisamment explicite pour dissiper les malentendus.

De tout ce qui précède, je voudrais que nous aidions nos chrétiens et compatriotes des zones embrasées par des conflits meurtriers à plus des solidarités pour combattre la culture du chantage, de la diabolisation, du mensonge qui ne peut que générer la paralysie déjà longue de notre tissu social. Notre mission commune est de rappeler sans cesse ce commandement. <<Vous êtes tous des frères >> : arrêtez les guerres. <<Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés >> (Jn13,34). Quel programme d'action pastorale en ces temps difficiles !

Veuillez agréer, Excellence Monseigneur, l'expression de ma profonde communion. Union de prières. Fait à Butembo le 14 Mars 2000

Mgr KATALIKO.



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Déclaration du Collège des Consulteurs
de l'Eglise de Bukavu (Sud-Kivu - Congo RDC)

Pourquoi Mgr Kataliko n’est pas encore de retour à Bukavu ?


Après deux semaines de concertations entre la délégation de l’Eglise
catholique et les autorités du RCD à Goma, le Vicaire Général de l’
Archidiocèse est rentré à Bukavu le 18 mars 2000. Dès ce jour, la reprise de
toutes les activités socioprofessionnelles, liturgiques et l’ouverture des
écoles ont été un signe de bonne volonté en réponse à la promesse verbale de
la présidence du RCD d’un retour prochain de Mgr KATALIKO dans son diocèse.
Etrangement, deux jours après, le porte-parole du RCD contredisait cette
promesse en excluant le retour de Mgr KATALIKO à Bukavu dans un bref délais.
La raison évoquée était l’interview de Mgr KATALIKO donnée une semaine avant
sur la Voix de l’Amérique et qualifiée par le même porte-parole de
déclarations incendiaires ». A la question de savoir quelles sont ces
déclarations incendiaires, M. Kin Kiey dira : « certains représentants de
certaines ethnies de cette province et certains pays, ont diversement reçu
les paroles de Mgr KATALIKO… et nous pensons que pour des raisons de
sécurité il nous faut garantir suffisamment de sécurité… et donc mettre
suffisamment de moyens pour que la vie de Mgr KATALIKO en tout cas ne puisse
pas être mise en danger ».
Au regard de la population de Bukavu qui attend avec impatience le retour
de Mgr KATALIKO, on se pose une question fondamentale : d’où peut venir l’
insécurité pour Mgr KATALIKO et qui est en train de la créer ?
Le 22 mars 2000, le Président du RCD, M. Emile Ilunga, renchérit sur ce
thème de l’insécurité en affirmant : « Nous ne pouvons pas prendre le risque
de le faire entrer à Bukavu et de lui faire courir un risque d’un acte
irresponsable ».
Or, le climat d’insécurité dans la région ne date pas d’aujourd’hui, soit
pour la population soit pour les institutions de l’Eglise Catholique. Ce
phénomène a été dénoncé à plusieurs reprises. Les deux derniers événements
en date ont été enregistrés à Nyakavogo et à Ciriri, dans la périphérie de
Bukavu. La nuit du 19 mars 2000, 14 hommes armés, dont 12 en uniforme,
parlant les uns kiswahili et les autres kinyarwanda, ont investi et pillé
systématiquement le couvent des Sœurs de la Sainte Famille de Nyakavogo, en
commune de Bagira. Cette mise à sac a duré de 21h00 à 2h00 du matin. La nuit
du 26 mars 2000, à 1h00 du matin, 12 hommes armés et en tenue militaire sont
entrés au presbytère de la Paroisse Catholique de Ciriri, en commune de
Kasha, après avoir pillé la maison voisine. Ils ont molesté les prêtres et
pillé la maison. Sans se gêner nullement de la sirène d’alarme, ni des cris
de la population venue à la rescousse, ils ont quitté les lieux
tranquillement à 2h30. Là aussi les assaillants parlaient ces deux langues.
Curieusement à proximité des deux endroits visités se trouvent des postes
militaires du RCD sous commandement ruandais : le camp T.V./Karhale et le
camp P.M./Bagira. Qui entretient ce climat d’insécurité ? Et pour quel but ?
Tout cela se fait en toute impunité ici comme dans les cas précédents.
Inutile de dire que, à notre connaissance, aucune enquête sérieuse n’a été
menée jusqu’à présent pour chercher les coupables et les punir.
Entre temps, les autorités du RCD prétendent qu’elles préparent des
conditions de sécurité pour le retour de Mgr Kataliko.

Pour l’Eglise de Bukavu,
Le Collège des Consulteurs




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* plus tu puises, plus elle est genereuse *
* If you draw from a real source, *
* the more you draw, the more the source is bountiful *
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