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ConfEpisCongo RDC
Veuillez trouver ci-dessous le message des évêques de la Conférence
épiscopale du Congo RDC, daté du 5 mars et distribué par l'Agence D.I.A. -
Kisnhasa
Paolo
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DOCUMENT D.I.A.
TOUS, POUR LES INTERETS SUPERIEURS DE LA NATION :
MESSAGE DES EVÊQUES DE LA CONFÉRENCE EPISCOPALE NATIONALE DU CONGO
AUX FIDÈLES CATHOLIQUES ET AUX HOMMES DE BONNE VOLONTÉ
Kinshasa, le 5 mars 2001 - (D.I.A.)- "Chers frères et sours,
1. Réunis à Kinshasa, en session ordinaire, du 26 février au 03
mars 2001, nous, Cardinal, Archevêques et Evêques membres du Comité
permanent, vous invitons à garder votre espoir et votre confiance dans
l'avenir. Dans la situation actuelle marquée par l'angoisse et
l'incertitude, nous vous assurons que Dieu nous aime toujours et nous
appelle tous ensemble, en tant que peuple, à redresser la Nation.
Mort du Président Laurent Désiré Kabila
2. Nous savons combien la disparition tragique du Président de la
République, Laurent Désiré KABILA, le 18 janvier dernier, a plongé la
Nation congolaise dans la consternation générale et le deuil. Nous nous
associons au peuple congolais pour présenter nos condoléances à la famille
de l'illustre disparu, aux autorités du pays et à toute la Nation. En même
temps, nous condamnons fermement ce crime ainsi que tout recours à la
violence pour résoudre les problèmes qui se posent au sein de la communauté
nationale, et de manière particulière, pour conquérir ou conserver le
pouvoir. De même, nous remercions tous ceux qui ont contribué à ce que le
pays ne sombre pas dans le désespoir, que l'on passe ces moments durs dans
la sérénité et l'on entrevoie les jours à venir avec grande espérance. A
cette occasion, nous pensons à tous nos frères et sours qui périssent ou
vivent dans des conditions effroyables à cause de la guerre qui sévit dans
le pays et de ses conséquences épouvantables.
Arrêtons la guerre
3. Il ne fait pas de doute qu'après cet événement douloureux le
peuple congolais exige plus que jamais la fin de cette guerre, afin de
vivre dans la paix et la dignité. Encore une fois, nous invitons les
différents protagonistes de cette guerre à y mettre fin sans délai. La
majorité de notre peuple n'a jamais donné son assentiment à cette
rébellion, ni cessé de condamner l'agression1. Car, la violence
d'où qu'elle vienne n'engendre pour le peuple que désolation, misère et
désespoir. L'expérience nous a appris - et nous le savons désormais - que
tout pouvoir conquis ou conservé par les armes finit par devenir oppressif,
voire répressif, des libertés fondamentales et des droits élémentaires des
citoyens. Il conduit inévitablement à des actes fratricides.
Nous sommes tous frères
4. Arrêtons donc la guerre, parce que nous sommes tous des
frères et sours, membres d'une seule et même Patrie. Au lieu de la guerre
qui détruit et ruine, le peuple exige plutôt la construction d'un Etat de
droit, d'une Nation forte et prospère, dans l'intégrité de son territoire
et la sauvegarde de sa souveraineté internationale. Nous nous réjouissons
des efforts que la communauté internationale est en train de fournir pour
amener la paix dans notre pays. Nous insistons pour que le retrait des
troupes d'agression soit accéléré afin de permettre à notre pays de
retrouver son intégrité territoriale et à notre peuple de recouvrer la
souveraineté sur son patrimoine économique. Cela nous permettra de nous
mettre ensemble en toute liberté, sans exclusion aucune, pour la prise des
décisions concernant le sort de tous, pour la gestion du bien commun, pour
le partage des richesses de notre pays.2
Dialogue intercongolais et consensus national
5. Nous avons la certitude que l'unique voie pour sauver
réellement la Nation et conjurer la paupérisation toujours croissante et
généralisée est de nous rencontrer tous dans un dialogue franc et sincère,
et de nous réconcilier entre nous. Grâce à ce dialogue, la menace de la
balkanisation de notre pays sera déjouée. Nous avons donc besoin d'un vrai
dialogue et non d'une simple déclaration de bonnes intentions, d'un
engagement courageux et authentique en faveur de la Nation congolaise et
non d'une soumission à la volonté de puissance de certaines forces étrangères.
6. Nous demandons encore une fois aux politiciens de ne pas
prendre le peuple en otage par le mensonge et la ruse, de ne point
se moquer de lui ou de poser des actes qui trahissent la confiance leur
témoignée. Le dialogue intercongolais n'est pas à considérer comme le lieu
de compétition préélectorale en vue d'un positionnement politique, ni
l'occasion de lutte en vue d'un partage du pouvoir au détriment du peuple.
La finalité du dialogue entre nous est de parvenir à l'institution d'un
nouvel ordre politique dans notre pays, ordre nouveau où des dirigeants
nouveaux seront vraiment soucieux du bien-être de la population et des
intérêts supérieurs de la Nation3.
7. Dans ce contexte, sans un consensus autour d'un projet de société, il
sera difficile, sinon impossible, de vivre dans la paix et d'assurer la
cohésion nationale et le progrès de tous. Il est impérieux que les
participants au dialogue intercongolais se mettent d'accord sur ce qui est
essentiel et qui nous unis tous. Le consensus national “ permettra en effet
de dégager les options fondamentales et de mettre en place les structures
politiques, sociales et économiques dont la Nation veut se doter et qui
serviront de normes de référence à tous les citoyens ”.[2] Le processus de
démocratisation, déclenché unanimement lors de la conférence Nationale
Souveraine, doit redémarrer pour aboutir, dans notre pays, grâce aux
élections générales libres et transparentes, à l'instauration d'un Etat de
droit.
Institutions de transition
8. Nous souhaitons qu'un gouvernement d'union nationale soit mis
sur pied à l'issue du dialogue intercongolais. Il aura pour mission
principale, outre l'exécution d'un “ programme urgent ” de réalisations
économiques et sociales, déterminé par le dialogue intercongolais,5 de bien
préparer les élections générales, dans le respect de la liberté d'opinion
et d' expression. Au terme de la période de transition, qui ne devrait pas
durer longtemps, toutes les nouvelles structures et institutions
républicaines devraient voir le jour. “ En ce qui concerne particulièrement
le cadre juridique et les institutions à mettre en place, nous espérons
qu'on présentera une Constitution où la séparation des trois pouvoirs sera
claire. Il reste toujours très dangereux de concentrer tous les pouvoirs
dans les mains d'une seule personne ”.6
Offre le pardon, reçois la paix
9. Les résultats du dialogue entre nous Congolais seront palpables
et durables seulement quand ils seront le fruit d'une authentique
réconciliation autour des intérêts supérieurs de la Nation. Avec toutes les
blessures infligées aux uns par les autres ainsi que les injustices
commises par les uns à l'égard des autres, on pourrait dire qu'une
réconciliation n' est pas possible dans notre pays. Il y en a qui ne crient
qu'à la vengeance et ceux qui exigent seulement que justice leur soit faite
pour parvenir à la réconciliation. Pourtant, nous savons tous que sans la
réconciliation, il n' y aura jamais de paix parmi nous. Voilà pourquoi,
nous vous exhortons, avec le Pape Jean-Paul II, à vous offrir mutuellement
le pardon, afin de recevoir la paix.7
10. Nous demandons qu'au cours du dialogue intercongolais soient
étudiées les modalités et les conditions d'institution d'une commission
vérité et réconciliation. A l'instar de ce qui s'est passé ailleurs,
celle-ci devra avoir pour mission de conduire les uns et les autres à la
purification de leur mémoire blessée par les injustices vécues, par l'
avilissement subi ou par l'arrogance affichée.
Aimons-nous les uns les autres
Chers frères et sours,
11. L'amour mutuel est à la base de tout engagement en faveur
de la réconciliation, de la paix, de la construction de notre pays et de la
consolidation de la Nation congolaise. “ Au-dessus de tout doit régner l'
amour ” (cf. 1 Co 12,31 ; 14,1)8. Nous sommes convaincus que le salut de
notre Patrie ne résultera que de l'amour, du respect mutuel, du respect de
la dignité de toute personne qui habite chez nous ou à côté de nous, de la
prise en considération de l'image de Dieu qui brille sur chaque visage
humain, image restaurée par le sang du Christ.
12. Tout cela ne peut être que le fruit des cours convertis et
humbles. Car, l'orgueil et la volonté de puissance conduisent les uns à ne
point respecter la dignité des autres et à foules aux pieds leurs droits
fondamentaux. L'orgueil pousse à minimiser les autres et leur contribution
à la reconstruction nationale. C'est la volonté de puissance et l'égoïsme
qui entraînent à être violents les uns envers les autres, à nier une
existence décente aux semblables et à ne point entendre leur cri de détresse.
13. Le Seigneur Jésus nous dit : “ Heureux les humbles, car ils
posséderont la terre ” (Mt 5,4). Grâce à l'humilité, les grands et les
petits vivent en frères, sans esprit de tyrannie ; les riches et les
pauvres se côtoient, partagent et s'entraident mutuellement, sans esprit d'
exploitation ; les forts et les faibles collaborent, sans esprit de
domination. L'humilité fait reconnaître l'importance et la dignité de l'
autre, quelle que soit sa condition sociale ; elle favorise l'estime
mutuelle, la solidarité, la paix et l'harmonie dans les relations
interpersonnelles. Voilà un programme que nous devons tous inscrire à l'
ordre du jour de nos rencontres quotidiennes, afin de rendre notre Patrie
paisible et prospère.
Hommage à S.E. Mgr Emmanuel KATALIKO
14. Avant de conclure, nous pensons encore une fois à notre frère
dans l'épiscopat Emmanuel KATALIKO, Archevêque de Bukavu et Vice-Président
de notre Conférence Episcopale. Le Seigneur a daigné appeler auprès de lui
ce serviteur humble et vaillant, tout dévoué pour la cause de l'Evangile,
au moment où son engagement pour la défense de la dignité de la personne
humaine et pour la promotion de la réconciliation et de la paix suscitait
de l'espoir dans notre pays.
Conclusion
15. En ce temps de Carême, prions sans cesse pour que Dieu fasse de
nous des hommes humbles, prêts au dialogue et au respect mutuel. Il
souhaite la paix à toute les nations (cf. Za 9,10) : paix pour ceux qui
sont loin, paix pour ceux qui sont proches (cf. Ep 2,17). Il ne nous a pas
abandonnés. Qu'Il maintienne ferme notre espérance et que la Vierge Marie,
Reine de la Paix et Reine du Congo, intercède pour nous.
Fait à Kinshasa, le 02 mars 2001.
LES EVEQUES MEMBRES DU COMITE PERMANENT DE LA C.E.N.C. PRESENTS A LA
SESSION DU 26 FEVRIER AU 02 MARS 2001
01. S. Em. le Card. Frédéric ETSOU, Archevêque de Kinshasa et Président
de la CENC
02. S. Exc. Mgr Floribert SONGASONGA Archevêque de Lubumbashi et
Vice-Président de la CENC
03. S. Exc. Mgr Godefroid MUKENGE, Archevêque de Kananga
04. S. Exc. Mgr Joseph KUMUONDALA, Archevêque de Mbandaka-Bikoro
05. S. Exc. Mgr Joseph BOLANGI, Evêque de Budjala, Président de la
Commission Doctrinale
06. S. Exc. Dominique KIMPINDE, Evêque de Kalemie-Kirungu, Président de
la Commission de l'Education Chrétienne.
07. S. Exc. Mgr Léonard DHEJJU, Evêque de Bunia, Président de la
Commission pour l'Apostolat des Laïcs.
08. S. Exc. Gabriel KEMBO, Evêque de Matadi, Président de la Commission
de l'Evangélisation
09. S. Exc. Mgr Gérard MULUMBA, Evêque de Mweka, Président de la
Commission des Séminaires et du Clergé.
10. S. Exc. Mgr Charles MBOGHA, Evêque d'Isiro-Niangara, Président de la
Commission pour les Religieux.
11. S. Exc. Mgr Louis NZALA, Evêque de Popokabaka, Président de la
Commission Caritas-Développement.
AGENCE DE PRESSE D.I.A. (Documentation et Informations Africaines) B.P.
2598 Kinshasa I - République Démocratique du Congo Directeur-Editeur
Responsable : VATA DIAMBANZA s.j. Tél. 243 - 12 - 33196 + 243 - 7802142 -
adresse E-mail : dia@ic.cd
1. Voir CENC, Conduis nos pas, Seigneur, sur le chemin de la paix(cf. Lc
1,79). Message des Evêques catholiques de la République Démocratique du
Congo aux fidèles et aux hommes de bonne volonté, du 7 novembre 1998, n°6.
Voir aussi CENC, "Sois sans crainte." (Lc 12, 32). La situation dramatique
actuelle et l'avenir de la République Démocratique du Congo. Déclaration
des Evêques de la République Démocratique du Congo aux catholiques et à
tous les hommes de bonne volonté, du 19 novembre 1999, n°6 et n°8.
2. Voir CENC, Conduis nos pas, n°8.
3. Voir CENC, "Lève-toi et marche" (Ac 3, 6). Message des Evêques
catholiques de la République Démocratique du Congo aux fidèles et aux
hommes de bonne volonté, du 28 juin 1997, n°16.
4. CEZ, Libérés de toute peur, au service de la Nation. Message des Evêques
du Zaïre aux Chrétiens Catholiques et aux hommes de bonne volonté, du 22
septembre 1990, n°15. Voir aussi CEZ, Libérer la démocratie. Déclaration
des Evêques de la République du Zaïre aux chrétiens catholiques et aux
hommes de bonne volonté, du 23 février 1991, n°12.
5. Voir CENC, “ Sois sans crainte. ”, n° 16, 2°.
6. CENC, Mémorandum au Président de la République Démocratique du Congo, du
28 juin 1997, n° 18.
7. Voir JEAN-PAUL II, Offre le pardon, reçois la paix. Message pour la
journée mondiale de la paix, Vatican 8 décembre 1996.
8. CENC, Conduis nos pas, n° 14.