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Contexte guerrier au Kivu (RDCongo) et abandon de la jeunesse





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source:
Collectif Vigilance Kivu
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Contexte guerrier au Kivu (RDCongo) et abandon de la jeunesse

juin 2000

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Table des matieres

- Contexte guerrier
Les forces en presence
Des agendas caches
Chair a' canon et esclavage
Frustrations
Violence et viol

- Problematique de la jeunesse
L'abandon
Descolarisation
Les exodes
Violence
Proliferation des armes et militarisation
Terrorisme et destabilisation des populations adultes et jeunes
Deculturation
Economie en detresse

Conclusion

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Les notes qui suivent decrivent le contexte dans lequel vivent les
populations du Kivu, a' l'est de la Republique Democatique du Congo.
Elles sont le fruit d'observations minutieuses et de reflexions menees sur
place par un collectif comprenant plus de 60 organisations de base oeuvrant
sur le terrain. Elles mettent en evidence les responsabilites locales et
internationales par rapport a' des enjeux que l'on pourrait synthetiser par
un petit recit:

- "le Congo est riche, dit le premier.
Saisissons nous de ses richesses.
Elles sont indispensables a' nos entreprises aeronautiques et nos
industries? Envoyons y nos suppletifs."

- "Nous sommes pauvres, dit le second.
Venez exploiter nos minerais, mais laissez-nous quelque chose pour mieux vivre.
Pourquoi nous faites vous la guerre alors que nous sommes prets a' vous les
vendre".

- "Nous sommes les maitres du monde, dit le premier.
Si vous voulez avoir nos miettes, pliez vous a' nos ukases ou partez."

- "Bien repondu, dit un troisieme, de quel droit le second nous
empecherait-il d'avoir le beurre et l'argent du beurre.
Armes et diamants ne font-ils pas bon menage au rendez-vous de la finance?
Il est de trop, le second.
D'ailleurs, de quel droit est-il la'?"

Un enjeu essentiel, dans cette region, porte sur la jeunesse.
Deja' completement abandonnee a' elle meme, durant le regime de Mobutu,
elle souffre aujourd'hui des pires maux que l'on puisse imaginer pour elle:
descolarisation, ignorance et militarisation dans un contexte politique
d'occupation ou la presence de troupes etrangeres suscite l'ecoeurement
general.

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----- Contexte guerrier



--- Les forces en presence

Le Kivu est actuellement parcouru par toute une serie d'armees ou de bandes
armees dont la plupart ont un statut prive'.

Forces etatiques
- Armee rwandaise (APR), force etrangere
- Armee ougandaise (UPDF), force etrangere
- Armee du Burundi
- Force infiltree de Kabila commandees par le general Luesha (dite Armee
"Luesha")

Forces "rebelles"
- Armee RCD de Goma, tendance Ilunga, proche du Rwanda
- Armees RCD tendance Bemba, soutenue par l'Ouganda
- Armees RCD tendance Wamba, soutenue par l'Ouganda
- Armee Baramoto (ex DSP de Mobutu)

Milices
- Interahamwe "originels" refugies de 1994, estimes a' 12.000 hommes pour
le Congo, dont 2.500 au Kivu
- Interahamwe instrumentees pour justifier la presence de l'APR dans la region
- Mayi Mayi ou FAP (Forces d'autodefense populaire)
- Forces mercenaires au service d'interets prives
- Forces Bangilima at Ruwenzori dans le nord-Kivu
- Force de Defense de la Democratie (FDD) du Burundi, dans le sud Kivu
- "Local defense"

Police

Residus d'armees
- Anciens FAZ (beaucoup se cachent)
- Ex FAR (ancienne armee de Habyharimana)

Groupes armes incontroles
- Groupes de delinquants et bandits armes

La plupart de ces forces sont dirigees par des commandants ou des chefs
privilegiant leurs interets prives, ou combinant leur fonction dans les
armees officielles avec leurs activites privees, en particulier dans les
carres miniers qu'ils controlent par la force.

Toutes les forces incriminees se paient sur le terrain en pillant les
ressources de la region ou les populations.
Les chefs militaires rwandais et ougandais s'assurent le controle de carres
miniers de coltan, titane, cassiterite, or, diamant, etc., de meme que
certains hommes d'affaire locaux agissant sous leur protection.
Les autres groupes armes fonctionnent en pillant systematiquement les
populations, alors que les autorites locales administrant la region
imposent des taxes exorbitantes dans tous les domaines possibles, sans que
ces taxes ne servent nullement a' la population et minant ainsi, toujours
plus, l'economie locale.

On assiste donc, ebahi, a' l'implosion apparemment programmee, de l'Etat
congolais aux seuls benefices de pays etrangers ou d'interets prives.
La privatisation de toute l'activite' economique rentable ne laisse
actuellement plus aucune place pour un Etat de droit et pour la
reconstruction des institutions nationales deja' tres fortement mises a'
mal par trente deux ans de mobutisme.



--- Des agendas caches

Il est clair que dans le tourbillon des attaques et des contre-attaques,
que les populations sont constamment prises en tenaille et laminees en
fonction des agendas fluctuants et caches, des parties belligerantes.

Ces agendas se situent a' plusieurs niveaux:
- la conquete du pouvoir par tous les moyens;
- le terrorisme.

Il correspond a' une volonte' manifeste de destabiliser les populations
dans le but de les faire fuir.
Des commandants etrangers visent directement des populations civiles, et
organisent des coups de force justifiant ensuite leurs represailles.

L'epuration ethnique par la guerre, la contamination par le sida, les
deguerpissements forces par la destruction de villages, apparaissent comme
les agendas caches des armees d'occupation, agendas que ne denoncent pas
les parains de ces armees;
- des interets prives, souvent mafieux, instrumentalisent les forces armees
et manipulent les esprits afin d'ouvrir la region a' tous les trafics, sans
vouloir aucunement assumer les besoins de la population sur les plans
economique et social;
- Ce sont principalement les interets strategiques des grandes puissances
qui attisent les conflits locaux.
Les Etats-Unis sont en premiere ligne, en direct ou par pays suppletifs
interposes (Ouganda, Rwanda, Afrique du Sud,...) en vertu du liberalisme
sauvage qu'ils entendent imposer sur le plan mondial.
Quel autre pays par exemple, dispose d'autant d'interet que les USA, pour
le coltan? Certaines societes privees exploitant les minerais du Kivu ont
d'ailleurs leur adresse de contact aupres de la section commerciale de
l'ambassade des Etats Unis a' Kinshasa.

Cette instrumentalisation est directe des lors qu'on envoie des agents sur
place (USAID par exemple) ou indirecte quand on aide les pays envahisseurs
par des programmes BIRD, FMI, etc., sans reconnaitre ni appuyer
equitablement l'autorite' de l'Etat Congolais.
Elle apparait aussi assez clairement dans les liaisons entretenues par les
USA avec les organisations internationales du systeme des Nations Unies
implantees au Kivu;
- Parmi les agendas caches des occidentaux, on peut aussi denoncer
l'hypocrysie qui consiste a' exiger la "democratisation" du regime
politique du Congo, sans jamais faire etat du caractere dictatorial des
regimes militaristes installes dans les pays voisins qui l'ont envahi.

Il existe d'autres agendas caches au sein de la population comme dans
l'esprit des belligerants:

- l'immense pauvrete' qui fait que n'importe quel enjeu foncier peut
inciter au crime
- le cycle de la vengeance: tu as tue' mon pere, je vais tuer ton oncle, ta
tante, ton frere, etc.
- la tentation du pouvoir personnel: j'ai un fusil, je puis arreter les
passants et leur prendre ce qu'ils transportent
- les rivalites entre bandes de delinquants armes, etc.

Le probleme majeur est qu'en l'absence de references politiques, sociales
et morales, les individualismes forcenes et les violences gratuites
s'imposent de plus en plus sans que l'Etat ne joue encore le role
regulateur qui devrait etre le sien.



--- Culture de la haine

La culture de la haine a pris pied dans la region du Kivu.
Cette culture a commence' a' s'imposer lorsque les problemes ethniques du
Rwanda et du Burundi ont ete' exportes au Congo.

Quoiqu'on en dise, les responsabilites principales des conflits au Kivu
sont etrangeres a' la region:

- responsabilites des genocidaires de 1994 et de tous ceux qui, d'une facon
ou d'une autre, entretiennent des semences de genocides,
- responsabilite' de la "communaute' internationale" incapable de prendre
les mesures necessaires pour la violence dans la region, et responsabilite'
de la Belgique qui fut incapable en 1994 d'exercer efficacement son mandat
onusien de pacification, ni de prendre les necessaires initiatives de
mediation en vue de la pacification,
- responsabilites de la France au moment de l'operation turquoise, qui
poussa la population hutue vers le Kivu, en meme temps que les milices et
les responsables du genocide des tutsis;
- responsabilite' de l'Union Europeenne qui, durant de nombreux mois, a
entretenu les camps de refugies hutus dans le Kivu, a' raison de 1 million
de dollars US par jour,
- responsabilites de l'Etat mobutiste qui n'a pas cherche' a' resoudre le
probleme des camps de refugies a' la frontiere du Rwanda, tirant profit de
la situation pour mater les "recalcitrants" du Kivu, trop actifs dans la
resistance au regime, en particulier lors de la Conference Nationale
Souveraine (CNS),
- responsabilite' des autorites de Kigali qui, au nom de la protection de
leurs frontieres, ont penetre' tres profondement dans le Congo, y compris
dans des zones ou' il n'existe pas de milices interahamwe,
- responsabilite' du Rwanda instrumentalisant les communautes congolaises
d'origine tutsie en vue d'affirmer leur domination sur le Congo,
- responsabilites du Rwanda et de l'Ouganda faisant fi des conventions
internationales de l'OUA, relatives a' l'intangibilite' des frontieres
africaines, et des conventions internationales sur la guerre,
- responsabilites des trafiquants d'armes, de matieres premieres et
d'argent sale qui, au Kivu, on trouve un nouvel eldorado.

Dans un tel contexte, il est evident que les populations ne sont que les
protagonistes passives de leurs souffrance.
Il est etonnant que la communaute' internationale ne fasse pas connaitre
haut et fort son point de vue a' ce sujet.
Plus etonnant encore est que, les habitants de l'est sont entierement
laisses a' eux-memes, leurs projets n'etant plus "eligibles" aupres des
bailleurs de fond, du fait de l'existence d'un front de guerre divisant le
pays en deux, et les organisations internationales s'etant pour beaucoup
retirees.

Parallelement, les populations du Kivu, a' travers leurs nombreuses
organisations, considerent qu'une injustice est commise a' leur egard
puisque leurs agresseurs beneficient, dans leurs pays respectifs, de
programmes de cooperation et d'aide budgetaire.
Elles exhortent les USA et les pays concernes de trouver des alternatives
a' la guerre pour l'exploitation des ressources du pays.

Les populations ne comprennent pas pourquoi on laisse libre champ aux
vendeurs d'armes, sans accepter d'embargos, libre champ qui fait que des
armes sont disponibles en tous lieux des paysages ruraux et urbains du Kivu.

A Kinshasa, les relations entre le pouvoir et l'opposition sont le plus
souvent tendues et l'on envisage normalement que le jeu de l'alternance du
pouvoir devra se realiser.
Les milieux internationaux mettent en avant, en partie a' juste tire, les
difficultes du regime a' reconnaitre son opposition. Les populations du
Kivu, a' l'exclusion des opportunistes du RCD, font savoir clairement
qu'elles souhaitent l'arrivee de Kabila car il represente a' leurs yeux la
legitimite' de l'Etat unitaire du Congo.
Toutefois, elles ajoutent que lorsque Kabila aura repris pied a' l'Est,
elles se chargeront aussi de l'obliger a' entrer dans un un processus de
negociation politique serree sur l'avenir du pays et sa bonne gouvernance.

"On laisse la haine se developper entre nous, dit-on au Kivu.
Il y a de vrais et de faux interahamwe, des bandes armees de tout genre et
chaque fois qu'elles se sont battues, ce ne sont que represailles contre
nos villages, nos biens, nos troupeaux, nos enfants.
Ce ne sont que viols et violences gratuites, comment imaginer que des
forces violentes et occultes ne soient pas a' l'oeuvre ici, pour creer la
haine et nous faire fuir vers d'autres regions?"



--- Chair a' canon et esclavage

L'embauche d'enfants soldats appeles "kadogos" a commence' en 1996 lors de
la "premiere guerre" entreprise par Laurent Desire' Kabila et l'AFDL pour
combattre Mobutu.
Aujourd'hui, les gens du Kivu parlent du "phenomene 100 dollars".
En effet, les kadogos etaient attires dans l'armee kabiliste, parfois parce
que leurs familles les encourageaient, mais parfois aussi parce qu'un
billet de 100 dollars representait un pactole inespere'.
Les enfants ainsi enroles furent entraines jusque dans les provinces
occidentales et en particulier a' Kinshasa.
Depuis 1996, certains enfants se sont aguerris et seront probablement
recuperables dans l'armee congolaise, d'autres ont ete' tues, d'autres
encore ont ete' laisses pour compte dans les villes ou les campagnes.
Nombreux sont ceux qui sont devenus "enfants de la rue", coupeurs de
routes, delinquants armes.

Au cours de la "deuxieme guerre" menee par le Rwanda et l'Ouganda avec des
forces congolaises suppletives, ainsi que certains elements plus autonomes
du RCD, toutes les forces en presence se mirent a' enroler ou emmener des
enfants.

-- Enroler d'abord.
Des enfants ont ete' amenes a' s'enroler volontairement pour plusieurs raisons:
- l'attrait de quelques dollars (entre 50 et 100, selon les bons vouloirs
des commandants locaux,
- les difficultes a' vivre au sein de leur famille et de leur village, dans
des economies de misere, sans espoir d'avenir, de scolarisation ni d'emploi
viable,
- l'esprit d'aventure et la force conferee par la possession d'une arme.

-- Captures aussi.
Les rapts se font de jour ou de nuit dans les villages, a' l'ecole (ce qui
engendre une forte descolarisation), sur les marches publics ou dans les
villages.
Il est frequent que des enfants captures ou enroles soient obliges a' se
battre contre leurs freres ou des parents directs.
Refuser de le faire entraine generalement des represailles sur les enfants
eux-memes ou sur leurs parents.

Parmi les enfants captures, il y a des petites filles ou jeunes filles
obligees de suivre des soldats pour les servir ou leur servir d'esclaves
sexuels.

Enrolements et captures entrainent une tres grande instabilite' dans les
villages.
Les habitants nomadisent en brousse, les jeunes filles ne logent plus dans
leur famille, les enfants qui ne souhaitent pas se battre se cachent comme
ils le peuvent, et surtout exodent vers les grandes villes ou' la securite'
est relativement mieux assuree.

Les enrolements volontaires et forces dans les armees ne sont pas les
seules souffrances de la jeunesse au Kivu.
Beaucoup d'enfants sont entraines vers les concessions minieres ou' ils
tombent dans les mains d'officiers ou d'hommes d'affaire installes dans les
centres, et en particulier a' Goma, ville frontiere avec le Rwanda.
Jeunes gens et jeunes filles sont utilises comme main-d'oeuvre servile.
Dans certains cas, le seul argent qu'ils recoivent est parfois celui qui
leur permet de se transporter vers les zones minieres, la' ou' ils sont
"pris en charge" par les exploitants miniers.

Parmi les creuseurs de mine, on trouve aussi d'anciens miliciens
interahamwe sortis des prisons du Rwanda et places sous le commandement
d'officiers rwandais s'etant attribue' des carres miniers.
Il est evident que des alliances ou des conflits s'installent entre le
petit monde de presumes genocidaires et les milices locales decidees a' en
decoudre avec "l'armee tutsi".

Les promesses n'etant jamais tenues, les enfants mobilises passent souvent
d'une milice a' l'autre, cherchant celle qui leur assurerait des revenus ou
un statut leur permettant "une meilleure vie".
Beaucoup finissent par etre degoutes des conditions qui leur sont imposees
par les seigneurs de guerre, mais n'ont pas la possibilite' d'echapper a'
ces derniers, par crainte de represailles qui s'abattraient sur eux-memes
ou sur leurs familles.

La militarisation generalisee de la zone et la proliferation des armes dans
le milieu rural conduisent de nombreux enfants a' retourner les armes
qu'ils detiennent contre leurs parents et leur milieu.
Ils s'organisent en bandes pour piller les villages et couper les routes et
y tendre des embuscades.
Certains deviennent des tueurs sans foi ni loi.

Les enfants perturbes, abandonnes a' eux-memes, deviennent de veritables
"bombes a' retardement" dans leur societe' qui, dans l'etat actuelle de
l'economie du pays, n'ont aucune chance de trouver un emploi a' la hauteur
de leurs aspirations.



--- Frustrations

A part un faible pourcentage d'enfants qui trouvent une voie dans les
armees, la plupart sont tres rapidement frustres.
L'espoir de trouver un peu d'argent est rapidement decu, mais il n'est pas
possible de retourner en arriere.
Certains arrivent a' s'extraire et se retrouvent en ville, brises dans
leurs etudes et dans les relations sociales, traumatises individuellement
et socialement, ayant perdu tout repere.
Traumatisees dans leur chair lorsqu'ils s'agit de petites filles ou de
femmes forcees a' se prostituer pour les besoins des enfants restes a' la
maison.

Le contexte de frustration depasse largement celui des enfants soldats:
- frustration des familles violentees auxquelles on vole des enfants,
- frustration des familles qui se voient menacees par leurs propres enfants
militarises et armes,
- frustration generale de la population rurale et urbaine dont les maigres
acquis economiques sont systematiquement pilles et detruits;
- frustration des intellectuels entraines, faute d'autres perspectives
economiques, dans la barbarie des guerroiements,
- traumatisme d'officiers formes dans les ecoles militaires d'Occident ou
d'Orient, et forces de combattre les populations au nom de rebellions qui
ne rencontrent aucun soutien dans la population. Parmi les mecontents,
certains sont elimines par les armes ou par emploisonnement, par des
autorites locales ou d'occupation n'hesitant pas a' assassiner leurs
opposants mecontents,
- frustration de certains bamis (autorites coutumieres) qui sont
marginalisees et ne peuvent plus remplir leur role aupres de leur
communaute',
- traumatisme d'intellectuels, de medecins, d'avocats, de notables.
qui voient leurs anciens amis ordonner des massacres inqualifiables,
- traumatisme des familles et des organisations de base qui assistent
impuissantes aux tueries et a' la destruction des dispensaires, des
medicaments et des recoltes,
- frustration de la population rurale qui est temoin un peu partout du
machiavelisme des troupes rwandaises qui "organisent" des attaques de faux
interahamwe dont la presence sert a' justifier la perpetuation de leur
guerre sur le territoire congolais.
Ce fut le cas, selon les temoignages de paysans, a' Katana, Kabamba,
Kaheshwe, Kahele, Kashire, Lwiro, qui sont pourtant "controles" par l'armee
rwandaise ou le RCD.
- traumatismes de combattants enroles volontairement ou de force, obliges
de combattre des membres de leur famille ou des voisins,
- traumatismes d'enfants soldats ou kadogos qui desertent les armee, mais
qui, selon celle dont-ils sortent, ne sont plus acceptes dans leur milieu
et y sont parfois poursuivis et tues,
- etc., etc.



--- Violence et viol

Violence et viol sont parmi les armes utilisees pour terroriser
systematiquement la population. Si une partie de ce terrorisme est le fait
de groupes armes formes de delinquants ou de milices, une autre partie
semble repondre a' une volonte' deliberee de destabiliser, sinon d'eliminer
la population regionale.

Les signes de cette volonte' de destabilisation se manifestent de multiples
facons.
Relevons-en quelques-unes:
- destructions de troupeaux dans des zones ou' le pastoralisme constitue
l'economie traditionnelle;
- deplacement de populations considerees comme tutsies, tels les
banyamulenge, vers le Rwanda, ou elles sont placees dans des camps de
refugies entretenus avec les moyens d'ONG et des institutions du systeme
des Nations Unies.
Ces deplacements forces visent peut-etre a' accroitre la proportion
populations du groupe tutsi en vue d'un reequilibrage demographique.
Il est probable aussi que ces operations cherchent a' manipuler l'opinion
publique internationale par rapport a' la situation perilleuse que ces
groupes seraient en train de vivre au Congo;
- destruction gratuite des stocks de vivres que ne peuvent emporter les
groupes armes (on y verse le sang d'un villageois egorge', on chie dans les
reserves de haricot,...);
- destruction et empoisonnement des medicaments destines aux enfants
lorsqu'on n'en a pas besoin pour combattre;
- viols individuels et collectifs des femmes mariees et des jeunes filles,
parfois dans l'intention de les contaminer par le sida.

Tout cela en presence d'armees qui sont sensees etre presentes pour
pacifier la region.

Des lors qu'elle a ete' violee, une femme ou une jeune fille ne peut plus
esperer creer de liens matrimoniaux normaux dans sa communaute'.
Les maris s'en desinteressent, et l'opprobre s'installe sur elles.
Certaines jeunes filles se marient en hate avec un soldat sans respecter
les regles traditionnelles du mariage.
Elles sont rapidement degoutees de leur situation de menageres de troupes.
Elles ne peuvent plus, des lors, que tomber dans la prostitution.

De nombreuses femmes mariees, violees, se voient immediatement abandonnees
par leur mari, soit par opprobe, soit par crainte du sida.
L'economie de misere ambiante s'en trouve encore plus affectee.



----- Problematique de la jeunesse

--- L'abandon

Tous les acteurs sociaux s'accordent a' dire que la jeunesse a ete'
abandonnee a' elle-meme depuis de tres longues annees.
Quasi tous les niveaux d'enseignements sont sinistres physiquement et
culturellement: classes delabrees et surpeuplees, maitres impayes,
programmes depasses, recyclages et documentation inexistants, travaux
pratiques detournes a' des fins inutiles, etc.

Les guerres qui sevissent depuis quatre annees n'ont fait que renforcer la
situation d'abandon des enfants et de la jeunesse, dans une economie locale
evoluant de plus en plus vers la misere totale, alors que l'exploitation
des ressources minieres connait un essor sans precedant dont les
populations ne profitent nullement.

En consequence de cette economie explosive, la jeunesse s'est vue impliquee
dans des processus de violence, de guerre et d'exploitation dont la
responsabilite' incombe tant a' des armees et des pouvoirs locaux qu'aux
forces etrangeres officielles ou privees n'ayant d'autre souci que leurs
interets particuliers.

Durant des journees de reflexion qui se sont deroulees a' Bukavu et a' Goma
autour du theme "Quel avenir pour notre jeunesse abandonnee?", plusieurs
themes focalises ont ete' abordes par les nombreuses organisations
participantes.
Ils refletent les preoccupations des familles du Kivu et de leurs associations:

- la descolarisation
- les exodes
- les violences et les viols
- la proliferation des armes et la militarisation
- les pillages et le terrorisme
- la delinquance
- l'instabilite' sociale et l'insecurite' collective
- la destruction des valeurs sociales
- la destruction des liens entre l'homme et son environnement
- la pauperisation et l'economie de detresse
- le servage economique
- la degradation de la sante' et l'explosion du sida

A la suite des travaux analytiques portant sur ces themes, des perspectives
d'action ont ete' recherchees en vue de solutions.



--- Descolarisation

La descolarisation se manifeste a' tous les niveaux de la scolarite':
primaire, moyenne et superieure.

A Kabare par exemple, 60% seulement des enfants vont encore a' l'ecole
primaire.
La diminution d'enfants scolarises est manifeste par rapport aux periodes
d'avant guerre.
La descolarisation se manifeste principalement chez les filles pour les
raisons suivantes:
- lorsque les parents d'une famille n'ont pas la possibilite' de payer la
scolarite' (1,5 $US par mois) de tous les enfants, ils paient d'abord pour
les garcons,
- les garcons et surtout les filles n'osent plus se presenter a' l'ecole
car les chefs de guerre y menent regulierement des razzias pour
s'approvisionner en jeunes soldats et filles a' tout faire.

Des lors que l'ecole leur est fermee, les jeunes n'ont d'autres solutions
que d'exoder vers les villes ou les carres miniers, de s'enroler dans
l'armee qui offre la meilleure solde, ou de trouver une arme avec laquelle
ils pourront spolier les habitants en coupant les routes ou en pillant les
villages des la nuit tombee.

La faiblesse des revenus ne date pas d'aujourd'hui.
Elle est toutefois accentuee par l'exode des hommes et des garcons.
Seules les femmes assurent avec leurs faibles forces la survie de la
famille et elles sont victimes des pillages d'hommes en armes.

Les jeunes ayant entame' des etudes secondaires n'arrivent pas a' les
poursuivre, faute de moyens.
Ils se retrouvent au chomage ou alors se mettent a' des petits commerces de
carburants ("kadaffis"), de cigarettes et de bonbons ("panistes"), qui sont
a' peine suffisants pour leur assurer la survie, mais pas pour payer la
scolarite'.



--- Les exodes

On peut dire que les exodes sont generalises.
Par le passe', on parlait le plus souvent de l'exode rural.
Des jeunes ne trouvant pas a' s'occuper au village tentaient, avec plus ou
moins de bonheur, de trouver du travail en ville.

Aujourd'hui, les phenomenes d'exodes se sont diversifies et demultiplies:
- exode traditionnel lie' au chomage ambiant dans les campagnes,
- exode volontaire ou force' vers les carres miniers,
- exode des jeunes et des familles qui quittent les villages pour vivre en
brousse, par crainte des incursions et des razzias,
- exode des jeunes dans les troupes et les bandes armees, dans l'espoir d'y
gagner un peu d'argent,
- exode des filles accompagnant les soldats dans leurs deplacements,
- exodes vers les pays voisins ou l'Occident.
Vers le Rwanda en particulier, qui accueille traditionnellement de nombreux
enseignants congolais.

Dans ce contexte d'exodes, les femmes mariees et meres de familles restent
sur place avec leurs enfants.
Souvent, les maris ne reviennent pas, tues dans les guerres ou s'installant
definitivement dans des centres miniers lointains.
Le nombre de veuves et de femmes abandonnees augmente.
Parfois elles sont obligees de se prostituer pour pouvoir survivre.
Elles sont pour la plupart dans I'impossibilite' de payer les frais
scolaires des enfants restes au village.



--- Violence

La violence regne en maitre dans la plupart des campagnes.


D'une part, cette violence prend ses racines dans le desarroi d'une
humanite' a' la limite de la survie, ayant perdu le sens des valeurs
communautaires et le sens du respect d'autrui.
Aucune autorite' n'etant reconnue comme legitime, par les populations du
Kivu, l'Etat n'existe plus et il n'y a plus aucune regulation sociale,
politique, juridique, fonciere, etc.
digne de ce nom.

D'autre part, il existe une violence organisee visant a' l'insecurisation
des populations, et qui semble avoir pour but de la faire fuir.
Certains "services" occidentaux considerent que les populations du Kivu
n'ont d'autre choix que de se plier aux injonctions des envahisseurs
rwandais et ougandais et de leurs sponsors, ou de disparaitre.
De nombreux signes indiquent qu'une persecution ethnique latente est en cours.
Elle passe par les traditionnels mefaits des troupes et des bandes de
pillards armees, et se traduit aussi par une volonte' deliberee de viols
individuels et collectifs qui auront sans nul doute, des consequences
demographiques negatives sur la region.

Certains faits corroborent l'existence d'un plan de reduction des
populations civiles du Kivu, dans le but de poursuivre l'occupation par les
rwandais.
Des groupes armes pretendument "non identifies" par les autorites du RCD ou
les troupes rwandaises, mais connus par la population locale qui les voient
agir, detruisent systematiquement les recoltes qu'ils ne peuvent emporter
dans leurs pillages.
D'autres detruisent systematiquement la chaine du froid indispensable pour
les campagnes de vaccination.

Au cours des derniers mois, le RCD et des groupes armes pretendument non
identifies se sont souvent attaques a' l'Eglise catholique.
L'archeveque Kataliko, de Bukavu, se trouve en residence surveillee a'
Butembo, vu ses prises de position publiques contre la guerre et le regime
en place dans la region. Des pretres et des seminaristes sont tues ou
intimides.

Les violences et surtout les viols participent puissamment a' la
destructuration sociale.
Des lors qu'une femme a ete' violee, elle est couverte d'opprobre.
S'il s'agit de jeunes filles, elles ne trouvent plus a' se marier, les
hommes pretendant craindre le sida.
Nombreuses sont les femmes qui ne trouvent plus d'autres solutions pour
survivre, que de se prostituer.

Selon les organisations qui s'occupent des jeunes de la rue ou des jeunes
enfants soldats s'enrolant volontairement, beaucoup sont en rupture de ban
avec leur famille.
On releve les difficultes des parents a' s'entendre entre eux et les
enfants, dans un contexte de pauvrete' ne laissant pratiquement aucun
espoir d'avenir aux jeunes.
Lors de certaines reinsertions, les choses se passent parfois tres mal.
L'enfant, mecontent des conditions de pauvrete' dans lesquelles vivent ses
parent, retrouve rapidement ses reflexes d'homme arme' et des menaces
fusent, surtout lorsqu'il retrouve une arme.

On trouve tres facilement des armes dans le milieu rural, suite a' leur
abandon par les milices de tous genres.
Des jeunes s'en saisissent pour terroriser et piller dans leur village.
Des familles migrent vers les villes, meme si elles pourraient arriver a'
vivre correctement dans leur village.



--- Proliferation des armes et militarisation

La proliferation des armes a' tous les niveaux inquiete fortement les
familles et les organisations.
Plusieurs raisons expliquent cette proliferation.

- de nombreuses armes sont bradees dans certains pays est-europeens comme
la Roumanie, l'Ukraine, la Bulgarie qui viennent d'entrer dans l'OTAN, ou
de la la Russie, compte tenu de l'obligation de ce pays de moderniser leur
armement.
Ces armes sont transportees directement vers le Kivu, par les memes
compagnies qui se livrent au trafic de diamant et de minerais.
Ces armes arrivent donc de facon incontrolee dans les aeroports de la region;

- les groupes armes defaits lors d'affrontements jettent leurs armes en
brousse avant de s'enfuir.
N'importe quel jeune tente' par la delinquance peut donc se procurer des armes.
Cela a notamment ete' le cas lorsque les FAZ (forces armees zairoises) ont
ete' bousculees par Kabila et l'armee rwandaise, en 1996.
Nombreux sont aussi les militaires qui veulent rentrer chez eux (ou changer
de camp) et qui revendent leurs armes dans le milieu;

- les armees d'occupation disposent d'un armement moderne et de nombreuses
roquettes.
Les populations du Kivu se demandent comment des pays pauvres comme le
Rwanda et l'Ouganda trouvent assez d'argent pour s'armer de la sorte et
venir faire la guerre sur leur territoire.
Elles reprochent aux Occidentaux
- en particulier aux USA
- de tollerer et meme d'organiser cet armement.
Elles ne comprennent pas pourquoi certains pays comme la France s'opposent
encore a' un total embargo sur les armes, pour les pays belligerants en
dehors de leur territoires respectifs.

Chez les populations de Kivu, de tradition pacifiste, la proliferation des
armes est en train de transformer la mentalite' des jeunes gens et des
jeunes filles qui trouvent dans la possession d'une arme un moyen rapide de
s'enrichir par le brigandage dans les villages ou le long des routes.



--- Terrorisme et destabilisation des populations adultes et jeunes

L'instabilite' au Kivu se manifeste des facons suivantes:
- des communautes vivent actuellement en brousse par suite des attaques
constantes et des destructions qu'ils y ont subies;
- les hommes et les jeunes gens quittent les villages, comme il a ete'
explique' plus haut;
- les jeunes filles n'osent plus dormir chez elles, par crainte des razzias.
Elles se retirent le soir en brousse, ou vont loger dans les missions
avoisinantes;
- les ecoles se vident pour les memes raisons;
- les marches sont souvent des lieux d'affrontement dans lesquels les uns
et les autres prelevent leur dime;
- un terrorisme particulier est celui de la manipulation du concept
d'interahamwe, la raison officielle de l'invasion du Congo par les Rwandais
etant l'insecurite' creee aux frontieres du pays par ces milices.
Plusieurs temoignages dans les villages indiquent que des soldats otent
leurs uniformes aux abords de certains villages afin d'apparaitre comme des
assaillants interahamwe.
Cela permet aux troupes "regulieres" d'exercer des represailles sur les
villageois senses abriter des milices hutues;

- d'autres formes de terrorisme aveugle sont signalees: depecage ou
enterrement de femmes vivantes, comme a' Mwenga, eliminations "gratuites"
de personnes de rencontre, incendies volontaires, destruction de tous les
animaux d'elevage, etc.

Il apparait necessaire de donner rapidement aux temoins de ces faits
horribles, la possibilite' de les denoncer et de ces crimes, leurs
executants et leurs commanditaires, en donnant date certaine a' leurs
temoignages, afin que des dossiers de justice nationale ou internationale
puissent etre rapidement constitues et que des plaintes puissent etre
etayees.



--- Deculturation

La deculturation et la perte des valeurs sociales et culturelles inquietent
hautement les familles et les organisations de base du Kivu.
Elles se manifestent sur tous les plans.
Relevons-en quelques-uns.


On constate la destructuration des rapports sociaux traditionnels et la
destruction des liens matrimoniaux.
Cela cree une forte destabilisation des jeunes gens et des jeunes filles
qui se marient en dehors de toute contrainte sociale.
Nombreuses sont les jeunes filles qui se marient a' des soldats, sans
accord des parents.
Comme elles sont rapidement degoutees de la vie guerriere, ou rejetees,
elles se retrouvent "filles libres" et ne pourront retrouver un statut
matrimonial normal.

Par ailleurs, la misere croissante fait que les peres n'arrivent plus a'
payer la dot en vue du mariage traditionnel.
Des recriminations et des menaces se manifestent alors contre les parents,
sans pourtant que le jeune concerne', disposant d'une arme, n'accepte le
moindre travail productif dans les champs familiaux.

On assiste aussi au phenomene inverse.
Des toute jeunes filles sont mariees en hate au village, les parents
esperant ainsi les preserver contre les razzias.
D'autres suivent les garcons armes, croyant ainsi gagner un statut et de
l'argent.
Ces types de mariages sont en fait tres instables, faute de se reposer sur
des references sociales, culturelles et economiques.

On constate egalement une dissolution des liens intergenerationnels.
De nombreuses familles etant dispersees en brousse ou en ville, du fait de
l'insecurite' et de l'exode, les liens sociaux et economiques se dissolvent.
Les jeunes, qui deja' ne frequentent plus l'ecole, ne trouvent plus non
plus de references dans leur milieu et leur famille.
L'apprentissage traditionnel de la culture, de l'activite' economique et
sociale, de l'environnement, ne se fait plus.

La pauvrete' ambiante engendre des crises dans le domaine de l'heritage.
Les jeunes ne prennent aucune tentative economique digne de ce nom,
attendant simplement de capter l'heritage de leur pere.

Quant aux jeunes intellectuels qui n'arrivent pas a' suivre l'ecole, ils
perdent leurs acquis et retournent dans l'ignorance.
Quelques-uns s'en sortent malgre' tout en pratiquant des petits metiers
traditionnellement reserves aux femmes, aux vieux (gardiens de nuit par
exemple), ou a' d'autres categories sociales.



--- Economie en detresse

Si l'economie des parrains de la guerre et des armees d'occupation est
particulierement florissante, l'economie populaire, elle, est en totale
detresse.

La seule ouverture d'un comptoir de minerais a' Goma, par exemple, coute
250.000 $US.
Les principales ressources arrachees au pays sont actuellement des produits
miniers comme le diamant, la colombo-tantalite qui sert dans les alliages
de haute technologie pour les programmes spatiaux, la cassiterite (etain),
le titane, l'or, etc.
L'exploitation de ces minerais dans les carres miniers privatises par des
societes bidon ou confisques par des seigneurs de guerre, s'opere dans un
contexte de militarisation sinon d'esclavage.
L'ecoulement direct des minerais est dans les mains de commercants
rwandais, ougandais, libanais, pakistanais, etc.
Mais il est connu que la marchandise ne prend sa valeur sur le marche'
mondial que des qu'elle est sortie du pays, d'autant plus que nombre
d'intermediaires locaux n'ont aucun sens des prix reels sur les grands
marches internationaux.

Le far-west du Kivu est comme un terrain vague que n'importe qui peut venir
exploiter sans se preoccuper des populations traitees comme de la
main-d'oeuvre servile.
Des hommes, des femmes et des enfants y meurent chaque jour dans les trous
miniers, sans que leur maitre n'appliquye aucune regle sociale.

Face a' cette economie de predation, l'economie rurale et urbaine du Kivu,
elle, est en totale detresse.

Il existe des raisons structurelles de cette detresse, deja' largement
decrite depuis de nombreuses annees.
Parmi ces raisons structurelles, les problemes demographiques et fonciers
sont essentiels.
Certaines zones sont a' ce point peuplees qu'une famille de 6 a' 10
personnes ne peut y trouver plus d'un hectare de terre, parfois moins.
On constate cependant qu'il existe encore de nombreux enregistrements de
terre operes par des riches commercants ou fonctionnaires capables de payer
les passe-droits necessaires.

Le faible dimension des terres disponibles pour les familles paysannes met
en cause les systemes traditionnels de succession. De nombreuses querelles
existent entre les heritiers, que d'aucuns n'hesitent pas a' resoudre au
moyen de leurs armes.

Aux raisons structurelles viennent s'ajouter les raisons circonstancielles
liees aux guerres.
De pillages en razzias, de vols en incendies, les champs, les troupeaux et
les maisons sont detruits.
Dans certains villages, les gens se sont mis a' n'elever plus que de la
basse-cour (cobayes, lapins, volailles), afin d'avoir un rien a' negocier
lorsque se presentent les pillards, plutot que d'avoir a' donner des
chevres ou des moutons.

L'incertitude est egalement totale pour les femmes qui transportent les
produits vivriers dans leurs hottes, vers les villes comme Bukavu et Goma.
Elles sont frequemment spoliees de leurs chargements et n'osent plus
remonter vers leurs villages passe' 15 heures.

Le chomage est generalise'.
Les chantiers sont arretes depuis belle lurette et il n'y a aucune chance
qu'ils reprennent avant la pacification et la mise en oeuvre de programmes
de rehabilitation.

Les femmes ont depuis toujours supporte' le poids de l'economie familiale,
se faisant parfois aider par leur mari, leurs fils et surtout leurs filles.
Ce poids est de plus en plus pesant compte tenu du depart, souvent
definitif, des hommes.
On trouve de nombreuses femmes abandonnees, des veuves de guerre, des
femmes repudiees ayant a' assumer seules les charges de familles nombreuses.
Ces familles eclatent bien souvent, les enfants se rebellant contre
l'impuissance de leur mere a' satisfaire leurs besoins essentiels
d'alimentation, de scolarite', de divertissement.





----- Conclusion

La communaute' internationale ne peut se desinteresser plus longtemps de la
situation dans l'est du Congo.
Appel est fait a' la presse pour qu'elle se rende sur les lieu afin d'y
examiner les mefaits et les responsabilites locales et internationales des
guerres publiques et privees qui s'y deroulent.

Appel est fait pour que soient clairement designes les responsables des
crimes de guerre qui se deroulent au Kivu afin qu'ils sachent qu'ils seront
poursuivis pour ces crimes.

Appel est fait a' toutes les forces vives internationales et nationales,
pour qu'elles dessinent des maintenant la rehabilitation des
infrastructures economique, sociales, sanitaires et culturelles sous des
formes qui permettent la reinsertion d'enfants et de jeunes gens ou jeunes
filles impliques malgre' eux, dans des conflits dont ils n'ont a' tirer que
d'indicibles souffrances.

Collectif Vigilance Kivu
Juin 2000

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Si vous souhaitez communiquer vos reactions, vous pouvez les transmettre
par l'email suivant:
vigilance.kivu@wanadoo.be

Si vous souhaitez manifester votre solidarite', un numero de compte
bancaire pourra vous etre communique'.
Une attestation fiscale vous sera envoyee pour tout don de plus de 25 euros.

Lecture recommandee:
Human Rights Watch, "Republique democratique du Congo, l'Est du Congo
devaste', civils assassines et opposants reduits au silence, vol.12, N. 3
(A), mai 2000, 38 pp.




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