Interview de Mgr Laurent Monsengwo sur la situation auCongo-Kinshasa

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source: D.I.A.
bulletin du 19 juin 2000
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INTERVIEW DE  MGR LAURENT MONSENGWO SUR LA SITUATION AU CONGO-KINSHASA

Rome, le 19 juin 2000 - (D.I.A.)
A la demande de ses lecteurs,  l'agence DIA publie l'integralite' de
l'interview de Mgr Monsengwo dont elle a fait  mention dans son edition du
12 juin 2000. Cette interview a ete' publiee par l'agence catholique Zenit
dans son bulletin du 8 juin 2000.

La cathedrale de Kisangani (Republique Democratique du Congo) a ete'
incendiee au cours de violents affrontements entre les armees du Rwanda et
de l'Ouganda, qui violaient les accords de paix.
La mission de paix de l'ONU, qui prevoyait le deploiement de 5.000 soldats
a ete' reportee car les conditions actuelles ne semblent pas permettre ce
deploiement.

"Avec le pays en guerre, divise' entre les forces de Kabila et les
rebelles, toutes les regions sont saccagees sans scrupules.
Il faut savoir en fait qu'il y a des puissances financieres et politiques
qui n'ont aucun interet a' ce que le Congo trouve la stabilite' car ainsi
elles peuvent continuer a' voler le petrole et les matieres premieres", a
declare' Mgr Monsengwo a' Zenit.
"Mais nous avons encore une grande richesse : l'esperance", a-t-il souligne'.

Mgr Monsengwo connait particulierement bien la situation en Afrique.
Il est president du Symposium des Conferences Episcopales d'Afrique et de
Madagascar (SCEAM) et fut pendant deux ans president de la Conference
Nationale qui redigea la Constitution qui aurait du permettre a' la
democratie de s'installer dans le pays mais qui fut rejetee par le General
Mobutu Sese Seko tout comme par le president actuel Laurent Kabila.

ZENIT : S'agit-il d'une guerre continentale ?

Mgr MONSENGWO : La paix au Congo est decisive pour la stabilite' de toute
l'Afrique. S'il y a la paix au Nigeria, en Angola, au Congo et en Afrique
du Sud, il y aura la paix dans toute l'Afrique.
S'il n'y a pas de stabilite' au Congo, il n'y en aura pas dans les pays
voisins non plus.
En attentant a' la securite' du Congo le Rwanda est en train de creer
l'instabilite' dans son propre pays.
Il ne peut etre stable s'il n'y a pas de stabilite' au Congo.
Il est important que le Nigeria et l'Afrique du Sud se mettent d'accord
pour donner une stabilite' au Congo.


Z : Le president Kabila peut-il retablir la paix ?

M : Il est evident que M. Laurent Kabila n'est pas en mesure de gouverner
le pays.
Il a une mentalite' qui date de 40 ans, de l'epoque du communisme et de la
guerre froide.
Personne ne pense comme cela maintenant au Congo.
Il a impose' une nouvelle dictature : toute personne qui exprime une
opinion differente de la sienne est arretee.
On n'arrivera jamais a' lancer le dialogue au niveau national, comme il fut
decide' lors de l'accord de Lusaka, car le president Kabila a peur du
processus democratique.

Z : Mais alors comment peut-on arriver a' la paix et a' la stabilite' au
Congo ?

M : Il y a des moyens pour etablir la vie democratique au Congo.
Le probleme est de mettre en oeuvre les decisions deja' discutees par le
peuple congolais lors de la Conference Nationale.
La democratie ne consiste pas seulement a' organiser des elections.
Tout le processus qui permet le vote doit etre democratique.
Il faut garantir la liberte' d'expression, la liberte' de pensee et le
respect des droits de l'homme.
Les Nations Unies doivent pouvoir envoyer des troupes qui ne soient pas
uniquement des troupes d'observation.
Elles doivent intervenir, avoir la possibilite' de se defendre et de
proteger la population civile.
Il faut renouer le dialogue pour que les forces politiques se mettent
d'accord pour retablir un Etat de droit, avec un gouvernement et des
institutions democratiques.
Le pays ne pourra pas etre gouverne' correctement si nous n'avons pas des
institutions, un gouvernement d'unite' nationale, et un Etat de droit.
Aucune institution ne pourra fonctionner sans le soutien de la population.

Z : Quelle est la situation de l'Eglise et comment contribue-t-elle a'
faire avancer le processus de paix ?

M : Dans cette situation chaotique, l'Eglise est la seule institution qui
s'occupe des besoins de la population.
Toute l'aide humanitaire passe a' travers l'Eglise.
Nous avons recemment par exemple eu besoin d'appareils pour purifier l'eau
dans le diocese de Kisangani.
Les rebelles se sont adresses a' nous pour obtenir les produits et les
machines necessaires.
Maintenant les autorites militaires nous ont demande' de changer la turbine
de la centrale electrique car sinon nous n'aurons pas d'electricite'.
Mais cette presence significative de l'Eglise gene, et de nombreux eveques
courent le risque d'etre assassines.
L'Eglise est unie meme si nous ne reussissons pas a' nous reunir.
Le pays est divise' par la guerre, et pour parler au telephone il faut
passer par les lignes internationales.
Malgre' cette situation de souffrance, les gens comprennent, prient avec
une plus grande ferveur et les vocations augmentent.
Notre message retentit encore avec une grande force et une grande clarte' :
il faut resoudre la crise par des moyens pacifiques en respectant le droit
international et le droit des personnes.
Il faut mettre fin a' la guerre et passer a' un dialogue qui implique toute
la population et pas seulement les hommes politiques.





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