PRESENTATION ORALE DU RAPPORTEUR SPECIAL SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO




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Organisation des Nations Unies

Commission des droits de l'homme
cinquante-septieme session
point 9 de l'ordre du jour:

Question de la violation des droits de l'homme et des libertes
fondamentales ou' qu'elle se produise dans le monde



PRESENTATION ORALE DU RAPPORTEUR SPECIAL SUR LA SITUATION DES DROITS DE
L'HOMME EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

E/CN.4/2001/40
et E/CN.4/2001/40.Add1

M. Roberto Garreton
Geneve, 2 avril 20001



Monsieur le President,
Distingues Delegues,
Mesdames et Messieurs les representants des organisations internationales
et non gouvernementales,

J'ai l'honneur de presenter mon septieme rapport et son Additif sur la
situation des droits de l'homme en Republique democratique du Congo
(ex-Zaire), conformement a' la resolution 2000/15 de la Commission des
droits de l'homme qui examine depuis 1994 la situation prevalant dans ce
pays.

L'annee ecoulee a ete' marquee par la poursuite des differents conflits
armes qui se deroulent sur le territoire congolais et qui appauvrissent et
accablent chaque jour davantage sa population, la poursuite de graves
violations des droits de l'homme, et au mois de janvier dernier,
l'assassinat du President Laurent-Desire' Kabila et les consequences qui en
ont resulte'.



ACTIVITES ENTREPRISES DANS LE CADRE DU MANDAT

Le Rapporteur a effectue' deux visites en RDC (aout 2000 et mars 2001) a'
l'occasion desquelles il a pu se rendre tant dans les zones controlees par
le Gouvernement que dans celles administrees par les mouvements de
rebellion.
Au cours de ces deux missions, il s'est entretenu avec les plus hautes
autorites de l'Etat, notamment avec le defunt President Laurent-Desire'
Kabila et a' deux reprises avec son fils qui lui a succede', le President
Joseph Kabila.
Il a egalement rencontre' les plus hauts responsables du Rassemblement
congolais pour la democratie (RCD), du Mouvement de liberation du Congo
(MLC) et du Front de liberation du Congo (FLC), mouvements qui controlent,
grace a' l'appui des armees du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi, plus de
la moitie' du territoire congolais.

Dans le cadre de l'exercice de son mandat, il a aussi conduit des
consultations a' New York.
A cette occasion, il a rencontre' le Secretaire general des Nations Unies,
des hauts fonctionnaires des differents departements et agences du systeme
des Nations Unies, le Facilitateur du Dialogue inter-congolais ainsi que
des representants de l'Organisation de l'Unite' africaine, de l'Union
europeenne et des organisations non gouvernementales.
Il a ete' invite' a' participer a' deux reprises (27 octobre 2000 et 23
fevrier 2001) a' une seance du Conseil de securite' organisee selon la
"formule Arria".



Monsieur le President,

LA GUERRE ACTUELLE: UNE SUPERPOSITION DE CONFLITS

Neuf conflits, certains ayant des dimensions internes et d'autres un
caractere international, se deroulent actuellement sur le territoire de la
RDC.
Sept armees regulieres etrangeres et 22 groupes armes irreguliers sont
impliques.
Les victimes de tous ces conflits sont toujours congolaises et le plus
souvent civiles.

Les conflits les plus graves sont ceux qui opposent a' l'est du pays le
Gouvernement au Rassemblement congolais pour la democratie/Goma (RCD)
appuye' par le Rwanda et au nord le Gouvernement au RCD/ML et au MLC, qui
ont fusionne' dans le Front de liberation du Congo (FLC) et qui sont
soutenus par l'Ouganda.
De plus, les affrontements directs entre les armees rwandaise et ougandaise
dans la ville de Kisangani ont entraine' la mort de plusieurs centaines de
civils congolais et des dommages materiels immenses.

Le Rwanda et l'Ouganda qui etaient qualifies par le Conseil de securite' de
"pays non invites" (1234 du 9 avril 1999) sont desormais, dans ses recentes
resolutions qualifies de "pays ayant viole' la souverainete' et
l'integrite' territoriale de la RDC" (1304 du 16 juin 2000) et de "forces
occupantes" (1341 du 22 fevrier 2001).

Les consequences tant humaines qu'ecologiques occasionnees par ces
conflits, bien que difficilement chiffrables, sont sans precedent.
A titre d'illustration pres de 2 millions de personnes seraient deplacees
et plus de 16 millions vivraient dans une situation d'insecurite'
alimentaire.

Par ailleurs, on estime que 37% seulement de la population a acces aux
services medicaux essentiels et 47% a' l'eau potable.

Le rapport du Panel d'experts charge' par le Conseil de securite' d'etudier
l'exploitation illicite des ressources naturelles du Congo devrait etre
rendu public cette semaine.



DE L'APPLICATION DES ACCORDS DE LUSAKA

Aucune des parties n'a respecte' les dispositions contenues dans les
Accords de cessez-le-feu de Lusaka signes en 1999.
Les positions militaires des parties impliquees n'ont pas evolue' de
maniere significative.
De maniere unilaterale, le defunt President Kabila avait decide' de
suspendre ledit Accord et avait continuellement entrave' le deploiement de
la Mission de l'organisation des Nations Unies en Republique democratique
du Congo (MONUC), qu'il avait pourtant accepte'.
Heureusement, le nouveau President s'est engage' a' respecter les
dispositions contenues dans les Accords de Lusaka et a initie' une bonne
cooperation avec la MONUC.

Aucune grave violation du cessez-le-feu n'a ete' enregistree depuis le
debut de l'annee.
Le desengagement des troupes de la RDC s'est ainsi acheve' le 29 mars
tandis que commencait le deploiement sur le terrain des premiers
contingents de casques bleus.



LE CONFLIT DE L'ITURI

Le conflit entre les ethnies Hema et Lendu, dans le district de l'Ituri
(Province Orientale), ou' le Rapporteur s'est rendu il y a 10 jours, est
certainement celui dont les consequences ont ete' les plus graves.

Les affrontements anterieurs entre ces deux ethnies (1887, 1911, 1923, 1966
pour citer les principaux) qui avaient pour origine des differends
fonciers, avaient toujours pu etre resolus par les autorites en place ou
les chefs traditionnels.

L'absence d'autorite' congolaise depuis plusieurs mois, les luttes
d'influence au sein du RCD/ML et enfin l'occupation de cette zone par
l'armee ougandaise et sa partialite' evidente en faveur des Hema (connus en
Ouganda sous le nom de Hima) expliquent que les differends n'aient pu etre
resolus comme par le passe' conduisant ainsi aux terribles massacres du 19
janvier dernier.
Une autre facteur a' l'origine de ce conflit: la discrimination. Les Lendu
defavorises par l'ancienne puissance coloniale belge, ont continue' a'
l'etre par les occupants ougandais et par certains representants influents
de l'eglise catholique de la place.

Ce conflit qui peut etre qualifie' de "violence ethnique ciblee, mais non
pas de purification ethnique" aurait fait, depuis 1999, plus de 15.000
victimes et entraine' le deplacement de pres de 175.000 personnes, dont
50.000 uniquement apres le 19 janvier 2001.

Le Front de liberation du Congo qui controle depuis le mois de fevrier
cette zone a initie' des son arrivee a' Bunia des consultations auxquelles
ont pris part 156 chefs traditionnels qui ont permis la signature d'un
Protocole d'accord le 17 fevrier 2001.



Excellences,

De nombreuses violations des droits de l'homme ont ete' portees a' ma
connaissance sur toute l'etendue du territoire congolais meme si quelques
progres ont ete' enregistres.



VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS LES TERRITOIRES CONTROLEES PAR LE
GOUVERNEMENT

Les violations les plus graves sont les atteintes a' la liberte'
personnelle (arrestations et detentions pour des motifs politiques), a' la
liberte' d'expression et d'opinion (plus de 35 journalistes ont ete'
detenus, menaces et condamnes l'annee derniere; les mesures
gouvernementales a' l'encontre de certains organes de presse prives comme
RTKM..), a' la liberte' d'association (le decret-loi N. 195 interdit le
fonctionnement des ONG).
Par ailleurs, plusieurs cas de torture, dont certains ont ayant entraine'
la mort, ont ete' enregistres.

Bien que les atteintes au droit a' la vie soient moins frequentes que dans
les zones sous controle du RCD, des condamnations a' mort prononcees par la
tristement celebre Cour d'ordre militaire, se sont poursuivies, ce en depit
des promesses du defunt President Kabila au Haut Commissaire aux droits de
l'homme et au Rapporteur special.

Le cas du Commandant Anselme Masasu et de plusieurs autres personnes,
traite' dans le rapport principal dans la rubrique "disparitions" est
particulierement preoccupant.
Le Commandant Masasu et 8 autres personnes, ont ete' sommairement executes
le 24 novembre 2000 dans la localite' de Cantonnier (province du Katanga).
Cependant ce fait a toujours ete' nie' par le Gouvernement.
Le Rapporteur a ete' informe' officiellement de l'execution du Commandant
Masasu, mais pas sa famille ni l'opinion publique congolaise.
Le President de la Cour d'ordre militaire a indique' au Rapporteur que la
COM n'avait pas l'habitude d'informer sur les sentences qu'elles prononcait.
Il a ajoute' qu'aucun membre de sa famille ne s'etait presente' a' la COM
pour s'enquerir de son sort.
Il s'agit la' d'un mensonge inqualifiable et inacceptable.
En effet, tant le Rapporteur que les ONG et la famille se sont manifestes
a' plusieurs reprises aupres des autorites afin de connaitre son sort.

Le jour de l'assassinat du President Kabila, le 16 janvier, l'auteur
presume' de cet assassinat, a ete' execute' et dans les heures qui
suivirent 11 libanais ont ete' arretes avant d'etre sommairement executes.
Il aura fallu deux mois pour que les faits soient reconnus par les
autorites et que les depouilles de 10 victimes soient restituees aux
familles.
Le sort du onzieme libanais demeure toujours non resolu.

Ces deux tragiques incidents se sont produits avant l'intronisation du
President Joseph Kabila qui n'en n'est donc pas responsable.
Le Rapporteur estime cependant que l'actuel Gouvernement se devait
d'informer les familles des victimes, ce qui n'a toujours pas ete' fait
officiellement dans le cas de Masasu.

Aucune avancee significative dans le sens de la democratisation n'a ete'
accomplie par le Gouvernement du President Laurent Desire Kabila.
Les activites des partis politiques sont toujours interdites et les
persecutions, dont continuent de faire l'objet les opposants, constituent
de tres serieux obstacles a' la mise en place d'un regime democratique.
La mise en place d'une Assemblee Legislative et Constituante - Parlement de
transition, sans representativite' et sans consultation prealable deroge
aux dispositions de Lusaka et n'a par ailleurs en rien reduit les pouvoirs
absolus que le defunt President s'etait attribue'.

Le Facilitateur du dialogue inter congolais, Sir Ketumile Masire, qui avait
ete' rejete' par le pere, a ete' recu, il y a deux semaines, par le
President Joseph Kabila.
Ce dernier a par ailleurs convie' recemment les representants des partis
politiques, y compris ceux qui n'etaient pas enregistres aux termes du
decret-loi N. 194, a' le rencontrer dans le cadre de la preparation du
Dialogue Inter-congolais.
Seulement quelques-uns ont accepte' cette invitation.

Le Rapporteur regrette que le President Joseph Kabila n'ai pas saisi la
tribune qu'est la Commission des droits de l'homme pour annoncer
l'abrogation des decrets-lois liberticides n. 194 et 195.

Une Commission internationale d'enquete sur l'assassinat du President
Kabila, composee de representants de la RDC et des pays alliees (Angola,
Namibie, Zimbabwe), a ete' mise en place par decret presidentiel.
Elle est dotee de tres larges pouvoirs dont celui de perquisitionner,
d'arreter et de detenir au secret des suspects.
Actuellement 58 personnes sont detenues au CPRK dont le Colonel Eddy Kapend
et le General Yav.
Aucune d'entre elles ne beneficie d'une assistance judiciaire.



Distingues Delegues,

VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS LES TERRITOIRES SOUS CONTROLE DU RCD/GOMA

Dans les territoires controles par le RCD et son allie rwandais, que la
population qualifie d'"agresseurs", le sentiment de peur et le climat de
terreur sont toujours perceptibles.
A l'instar des annees precedentes, des massacres et des atrocites ont ete'
commises a' l'encontre de la population locale.
Les militaires rwandais agissent par ailleurs en toute impunite'.
Plusieurs personnes sont mortes des suites des mauvais traitements.

L'exercice du droit a' la liberte' personnelle demeure toujours tres
limite' et plusieurs defenseurs des droits de l'homme ont ete' menaces et
arretes.
Il n'y a pas de presse independante et les rares bulletins d'information de
la societe' civile sont interdits.
Toute dissidence ou opposition est percue par les autorites comme un "acte
de collaboration avec le regime Kabila" ou comme une "tentative de
genocide".

Le Rapporteur a recu des informations relatives a' la deportation de
citoyens congolais vers le Rwanda.
Dans son rapport, le Rapporteur traite egalement et pour la premiere fois
de la question de la liberte' de conscience et de religion, suite aux
nombreuses attaques contre des paroisses, des centres scolaires et de
sante' administres par les congregations religieuses.
Des pretres, des pasteurs ont ete' arretes et assassines.
Plusieurs reunions organisees par les eglises ont ete' interdites et
l'archeveque de Bukavu a ete' empeche' pendant plusieurs mois de regagner
son diocese.
Le RCD et ses milices d'auto-defense, qui constituent un veritable "Parti
Etat" se sont rendus responsables de nombreuses violations des droits de
l'homme.

Le Rapporteur a cependant constate' lors de sa derniere mission, au mois de
mars, que les relations qui etaient extremement tendues entre les autorites
et la societe' civile s'etaient ameliorees.
Les ONG peuvent desormais avoir acces plus facilement aux centres de
detention qui relevent du parquet.
Toutefois l'acces aux autres cachots ou' le recours a' la torture serait
frequent demeure toujours tres limite'.
Des efforts ont par ailleurs ete' enregistres dans le domaine de
l'administration de la justice et une amelioration des relations entre les
institutions judiciaires et les services de securite' a aussi ete'
constatee.
Une personne condamnee a' mort par le Conseil de guerre operationnel a ete'
executee en mars 2000.
Aucune execution n'a ete' enregistree apres cette date.



VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME DANS LES TERRITOIRES SOUS CONTROLE DU FLC

Au mois d'aout 2000, le Rapporteur avait visite' Gbadolite, siege du MLC.
Il avait constate' qu'il n'y regnait pas le meme climat de terreur comme a'
Goma, Bukavu et Kisangani.
Lors de sa recente mission, le Rapporteur s'est rendu a' Beni et Bunia, qui
jusqu'au mois de janvier etaient administres par le RCD/ML.
Il a remarque' qu'il existait au sein de la population, un sentiment
fortement perceptible de rejet des autorites en place et plus
particulierement de l'armee ougandaise, a' l'instar de celui prevalant dans
les zones sous controle du RCD/Goma.

Les efforts du FLC pour trouver une solution au conflit entre les Hema et
les Lendu ont manifestement ete' apprecies par la population qui espere par
ailleurs que le President Bemba pourra rapidement s'imposer face a' son
allie' ougandais afin qu'il se retire des zones qu'il occupe toujours et
ce, dans les plus brefs delais.

Le Rapporteur a pu visiter tant a' Bunia qu'a' Beni des cachots souterrains
qui etaient utilises sous l'administration du RCD/ML pour detenir, dans des
conditions infrahumaines, des prisonniers.
Si aucune personne n'etait detenue dans le premier cachot, le second
abritait des militaires parlant l'anglais.



VIOLATIONS DU DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE

Le rapport examine egalement des violations du droit international
humanitaire, commises par toutes les parties au conflit (Cf. paragraphes
137 a' 152), qui ne seront pas abordees dans le cadre de cette presentation
orale.
Du cote' des forces loyalistes, les actes les plus graves ont ete' les
bombardements de la population civile et les attaques des milices Mai Mai
soutenues par le Gouvernement.
Le RCD et ses allies n'ont quant a' eux pas hesite' a' tuer des civils sans
defense en represailles a' des attaques conduites contre leur position par
les "forces negatives" (Mai Mai, Interahamwe, ex-Far....).
Peu de violations du droit international humanitaire ont ete' enregistrees
au cours de ces derniers mois.



Mesdames, Messieurs

SITUATION DES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME

La situation des defenseurs des droits de l'homme tant dans les zones sous
controle du Gouvernement que dans celles administrees par les mouvements de
rebellion est toujours tres precaire et preoccupante.
Ils sont menaces, arretes et detenus et leurs bureaux sont souvent
perquisitionnes voire fermes.

Dans les territoires sous controle du Gouvernement, ils sont consideres des
allies de la rebellion; a' l'est, ils sont consideres comme allies du
Gouvernement.
Ces harcelements constituent une violation flagrante des dispositions
contenues dans la declaration approuvee par la resolution 53/144 approuvee
par l'Assemblee generale.

Le Rapporteur, en depit de ses appels repetes aupres du Gouvernement, n'a
pas ete' en mesure de recevoir des informations sur le sort d'un militant
de l'Association africaine des droits de l'homme(ASADHO), section
Lubumbashi, M. Golden Misabiko, qui a ete' arrete' le 15 fevrier dernier.



MISSION CONJOINTE D'ENQUETE SUR LES MASSACRES DE 1996-1997

Monsieur le President,

Comme vous le savez, la Commission des droits de l'homme, m'a mandate'
depuis 1997 pour conduire, avec deux autres collegues (le Rapporteur
special sur le executions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et un
membre du Groupe de travail sur les disparitions forcees ou involontaires),
une mission conjointe d'enquete sur les allegations de massacres et autres
violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire
commises entre 1996 et 1997.
Cette enquete n'a pas pu etre conduite en 2000 etant donne' la precarite'
de la situation securitaire (Cf. Note du Secretariat E/CN.4/2001/41).

Toutes les parties au conflit reconnaissent desormais que des violations
massives des droits de l'homme et du droit international humanitaire ont
ete perpetrees et demandent que des enquetes soient diligentees.
Le Rapporteur a accueilli par ailleurs avec interet les declarations du
nouveau President confirmant que des massacres avaient ete' commis et sa
disposition a' cooperer avec la mission conjointe.



Excellences,

LE PHENOMENE DES ENFANTS SOLDATS

L'une des preoccupations exprimees par le Conseil de securite', le
Secretaire general, l'UNICEF et de tres nombreuses institutions et
personnalites avec lesquelles je me suis entretenu est le recrutement et
l'utilisation d'enfants soldats par toutes les parties en conflit.
Il s'agit d'un probleme extremement complexe.

L'eclatement de la cellule familiale, la pauvrete', les abandons,
l'augmentation du nombre d'orphelins en raison de l'epidemie du HIV ont
conduit de tres nombreux enfants a' la rue (les "shegues").
Les consequences du conflit en cours sont multiples sur la situation des
enfants: mutilations, abandons scolaires, dommages psychologiques.
Ils ne sont cependant pas traites dans l'additif du rapport, qui visait
principalement a' analyser les methodes de recrutement et d'enrolement
ainsi que l'utilisation des enfants soldats par les parties en conflit en
RDC.

Le Rapporteur a constate' que toutes les parties impliquees, qu'elles
soient ou non signataires des Accords de Lusaka, ont recours aux enfants.
La problematique des enfants soldats est apparue pour la premiere fois en
RDC en 1996.
Ce phenomene est une methode importee par les armees ougandaise et
rwandaise, qui ont soutenu l'AFDL et qui n'etait pas pratique' par les FAZ.
Le Rapporteur n'est cependant pas en mesure de donner une estimation quant
a' leur nombre.
Malgre' ses demandes repetees, aucune partie ne lui a fourni des
informations sur le nombre d'enfants dans leurs rangs.

- Dans les territoires controlees par le gouvernement
En depit de l'adoption par le Gouvernement d'un decret-loi portant
demobilisation et reinsertion des groupes vulnerables (9 juin 2000), le
Rapporteur a ete' en mesure de confirmer que le recrutement des enfants se
poursuivait notamment parmi ceux de la rue (les 'shegues') afin de les
integrer non seulement dans les FAC mais aussi dans les Forces
d'autodefense populaire, milices nouvellement etablies.

- Dans les territoires controlees par les Mouvements de rebellion
La situation la plus preoccupante est cependant celle prevalant dans les
zones sous controle du RCD/Goma et du RCD/ML.
Le RCD/Goma a etabli en mai 2000 une commission sur le processus de
desarmement, de demobilisation et de reinsertion sociale des enfants
soldats ou combattants.
Cependant, malgre' cette decision, non seulement les recrutements se sont
poursuivis mais plus encore, des campagnes officielles de recrutement a' la
radio ont eu lieu pour encourager les "watotos" (enfants en swahili) a'
integrer l'armee et les Local Defence Units.
Le Rapporteur a recu des informations sur plusieurs camps de formation
d'enfants encadres par l'armee rwandaise dans la province du Sud Kivu.
La presence de camps d'entrainement dans les provinces du Maniema et
Orientale a par ailleurs ete' confirmee.

Le probleme des enfants soldats se pose cependant avec la plus grande
acuite' dans les zones controlees par l'Ouganda.
Les forces du RCD/ML ont non seulement etabli des camps de formation mais
ont aussi organise', avec l'appui de l'armee ougandaise, l'acheminement
d'enfants vers des camps de formation militaire en Ouganda.
Le transbordement d'au moins 163 enfants congolais dont 3 fillettes a pu
etre confirme', au terme d'une enquete conduite magnifiquement et pendant
plusieurs mois par l'UNICEF.

Le FLC, comme toutes les autres parties, nie recruter des enfants.
Il reconnait seulement qu'il a ete' conduit a' "recuperer des enfants qui
etaient dans les FAC de Kabila".
Le FLC a indique' au Rapporteur que les enfants qu'il avait vu a'
l'aeroport de Buta avaient ete' achemines dans cette ville "pour les
eloigner de la ligne de front".

Les milices Mai Mai, les mouvements de rebellion ougandais operant en RDC
(NALU et ADF) ainsi que les Interahamwe, les ex-Far et les FDD
procederaient egalement a' des enrolements forces d'enfants.

Face a' cette situation, le Rapporteur propose qu'une etude detaillee sur
le phenomene des enfants soldats en RDC soit conduite afin d'examiner les
dimensions sous regionales de ce probleme.
L'UNICEF, le Representant special du Secretaire general pour les enfants et
les conflits armes devraient avoir acces tant sur le territoire congolais
que dans les pays a' propos desquels (en particulier le Rwanda et
l'Ouganda) ils ont obtenu des renseignements relatifs a' l'existence de
camps dispensant une formation militaire aux enfants congolais.



CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

Monsieur le President,
Distingues Delegues,

Tout en reiterant les conclusions et les recommandations figurant dans le
rapport principal et son additif, je souhaiterais attirer votre attention
sur un fait qui me semble capital.

Tout au long du XXeme siecle le monde entier a ete confronte' a' des
centaines de guerres et de conflits qui n'ont epargne' que de tres rares
pays.
Mais aucune de ces guerres n'a vu s'affronter deux pays democratiques.
Ce constat doit conduire la communaute' internationale a' exiger de tous
les pays impliques dans le drame congolais, et avec la meme vigueur,
l'instauration de regimes democratiques dans leurs pays respectifs.
Il s'agit d'une obligation pas seulement politique mais aussi morale et
juridique qui ne serait se dissimuler derriere le concept de la "bonne
gouvernance".
Il ne peut y avoir de "bonne gouvernance" sans democratie et sans respect
des droits de l'homme.
La paix ne sera restauree en RDC et dans la region des Grands Lacs
seulement si tous les acteurs se soumettent et sont soumis aux memes regles
de droits et de cohabitation tant internes qu'externes.

La crise congolaise est regionale et ne trouvera sa resolution que si cette
dimension est pleinement prise en compte.
Le peuple congolais est desespere' de vivre dans un pays divise' en trois
parties: un Congo congolais, un Congo rwandais et un Congo ougandais.
Dans le processus de reconstruction d'un Congo reunifie', il est
indispensable que les aspirations legitimes de toutes les Congolaises et de
tous les Congolais soient pleinement prises en compte.

Le Rapporteur est conscient que la resolution de certains conflits
historiques requiert des solutions globales.
Cependant leur resolution ne peut en aucun cas transgresser certains
principes que sont le respect des droits de tous, la traduction devant les
juridictions competentes des personnes qui se sont rendus coupables de
crimes contre l'humanite' et enfin le respect des frontieres heritees de la
colonisation.

Je vous remercie.





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