Justice et Libération : réflexion sur les accords conclus à Sun City






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source: Groupe Justice et Libération - Kisangani
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Groupe Justice et Libération
Association chrétienne de défense des droits de l'homme
Av. Major Vangu, N° 9, Commune de la Makiso,
Kisangani (RDC)
Tél. 00873.762.014.330, Fax 00873.762.014.332


POUR LA POURSUITE DU DIALOGUE INTERCONGOLAIS:
REFLEXIONS SUR LES ACCORDS CONCLUS EN MARGE DES TRAVAUX


Introduction
La clôture du Dialogue Inter-Congolais ( DIC) dont les travaux se sont
déroulés à Sun City, en Afrique du sud, a donné lieu à des réactions très
diverses, les unes proclamant son échec à cause de l'absence d'un compromis
politique global et les autres clamant sa réussite au regard de l'accord
partiel de la gestion de la transition conclu entre le Gouvernement de
Kinshasa et le Mouvement de Libération du Congo  (MLC)

Le Groupe Justice et Libération, une association chrétienne de défense des
droits de l'homme basée à Kisangani, qui milite en faveur de la résolution
pacifique de la crise congolaise à travers les négociations politiques
prévues par l'Accord de Lusaka, donne, à travers les lignes qui suivent, son
point de vue

Objectifs du dialogue inter congolais

Le Dialogue inter-congolais  est le volet politique de l'Accord de Lusaka
signé en 1999 par les protagonistes de la crise congolaise. Il figure au
chapitre 5 de cet accord qui a longtemps battu de l'aile avant d'être
effectif à partir du 25 février dernier. Les objectifs principaux du DIC sont
les suivants:

-   Mettre fin à la guerre ;
-   Pacifier et sécuriser l'ensemble du territoire national ;
-   Rétablir l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire national ;
-   Mettre sur pied, de manière consensuelle, des nouvelles institutions et
les doter de nouveaux animateurs pendant la période de transition devant
conduire le pays à des élections libres, démocratiques et transparentes ;
- S'accorder sur le retrait ordonné de toutes les troupes étrangères.
C'est en fonction de ces objectifs que l'on peut raisonnablement émettre un
point de vue sur l'issue du DIC tout en sachant que le mode de prise des
décisions convenu pour ces négociations est le consensus.

Clôture du dialogue

Après 52 jours de travaux, les participants au DIC n'ont pas abouti à un
accord politique qui aurait permis de gérer, de manière collégiale, la
transition en vue de préparer les conditions des élections libres,
démocratiques et transparentes pour les nouvelles institutions de la
troisième République.
Les discussions ont achoppé sur le nouvel ordre institutionnel et ses
différents animateurs. Comme pour sauver le dialogue, le Président Thabo
Mbeki, hôte de ces assises, a présenté deux schémas des institutions de la
transition. Le premier scénario prévoyait une présidence, cinq vices
présidences, l'assemblée nationale et les cours et tribunaux. Ces postes
étaient confiés respectivement au gouvernement, aux belligérants et aux
partis politiques non armés. Ce schéma a été rejeté par toutes les
composantes à cause de la non clarification des attributions de chaque
vice-présidence. Ainsi, sur base des amendements des participants, le
Président Thabo Mbeki a proposé la deuxième mouture qui prévoyait la
présidence à confier au Gouvernement, la première vice-présidence à occuper
par le  Rassemblement congolais pour la Démocratie  (RCD) avec les charges de
la défense, de l'intérieur et de la sécurité ainsi que de l'organisation des
élections, la deuxième vice-présidence reviendrait au <I>Mouvement de
Libération du Congo  (MLC) avec les portefeuilles de l'économie, des finances
et de la reconstruction. Jusqu'au denier jour, un consensus n'a pas pu être
dégagé sur ce deuxième plan.

L'accord-cadre entre le Gouvernement et le MlC

Cependant, lors de la dernière plénière, le Gouvernement et le MLC ont
annoncé qu'ils ont signé un accord-cadre pour la gestion de la transition en
invitant les autres composantes à se joindre à eux sans avoir préalablement
soumis cet accord à la discussion de la plénière. Cet accord , qui a été
signé, en dehors de la plénière, par toutes les composantes sauf le RCD et
certains partis politique non armés dont l'UDPS, le PALU et le FONUS,
confiait la Présidence au Gouvernement avec Monsieur Joseph Kabila comme
Président, réservait la primature au MLC avec Monsieur Jean Pierre Bemba
comme Premier Ministre, donnait l'Assemblée Nationale au RCD, le Sénat aux
partis politiques non armés tandis que la Société Civile devrait diriger les
institutions citoyennes d'appui et d'accompagnement de la démocratie.

Il y a lieu de noter que le dialogue, en sa plénière du 19 avril, avait
décidé par consensus, de constituer un comité de suivi chargé de poursuivre
les concertations pour parachever le travail commencé. Chaque composante
devrait designer 5 personnes pour la formation de ce comité. Le Gouvernement
et le MLC ont boudé cette decision

L'alliance pour la sauvegarde du  Dialogue inter-congolais

La clôture du DIC par la signature d'un compromis politique entre le
Gouvernement de Kinshasa  et  le Mouvement de Libération du Congo  MLC a
suscité des réactions très diverses au sein de la population congolaise. Si
les uns s'en prévalent puisque signé par " la majorité des composantes " et
jouissant de l'appui de la population, les autres le dénoncent comme étant
contraire à la lettre et à l'esprit des l'Accord de Lusaka et du consensus,
mode déterminé pour la prise des décisions de ces négociations politiques.

Et ainsi, comme pour contrer cet accord-cadre entre le Gouvernement et le
MLC, il vient d'être créé une alliance pour la sauvegarde du dialogue (ASD)
dont les membres sont le RCD, l'UDPS et quatre autres partis politiques. La
présidence de cette alliance dont le siège projeté est la ville de Kisangani
est confiée à Monsieur Etienne Tshisekedi, épaulé par deux vices présidents,
le premier chargé des ressources matérielles (Monsieur Katebe Katoto) et le
second ayant la charge des ressources humaines ( Monsieur Adolphe Onusumba du
RCD). La coordination, avec des secrétaires nationaux, ayant en charge
chacun, un portefeuille de responsabilité, est confiée à Maître Azarias
Ruberwa du RCD.

Analyse

L'accord-cadre entre Kinshasa et Gbadolite est à la fois une chance et un
risque. La chance réside dans la bipolarisation de la discussion politique
entre deux centres, ce qui réduit le champ de divergence et évite
l'éparpillement de nombreuses revendications et ambitions. Il se dessine
donc, en perspective, une nouvelle configuration des alliances dont la survie
est fonction de la sincérité des uns et des autres

Comme tout le monde est acquis à l'idée de poursuivre les contacts pour
résorber les divergences non encore aplanies sur le nouvel ordre politique,
le texte de cet accord peut servir d'instrument de travail pourvu que les uns
et les autres jouent franchement le jeu en se remémorant que la gestion de la
transition doit être consensuelle et aider à préparer les élections libres
pour la démocratisation du pays

Il est également avancé que cet accord s'inscrit dans les efforts de vrais
patriotes pour sauver la nation en péril. Cet argument ne peut convaincre que
dans la mesure où se matérialise la volonté annoncée par Kinshasa et
Gbadolite de rapprocher les non-signataires de ce compromis que tout le monde
a qualifié  à juste titre  de partiel. En d'autres termes, toutes les parties
reconnaissent qu'un accord global n'est pas encore conclu. Donc des
mécanismes plus souples et plus réalistes devraient être mis en place pour
parachever les négociations.

D'autre part, il est à craindre la radicalisation des positions des deux
centres d'impulsion politique qui, à défaut de patience, relanceraient la
guerre qui, cette fois, fera encore plus de victimes aussi bien directes
qu'indirectes. En effet, la recomposition du territoire national occupé par
la coalition Gouvernement - MLC est telle que les affrontements risquent de
mettre en étau certaines parties de la République telle que Kisangani et
Goma, condamnant ainsi les populations à une situation humanitaire de plus
précaire. Ce risque n'est pas à négliger étant donné l'agenda caché des
troupes étrangères qui opèrent au Congo et la vénalité des politiciens
congolais.

En tout état de cause, l'on ne peut s'empêcher de dénoncer cet accord, qui
non seulement n'a pas été soumis à la plénière pour obtenir son consensus
mais aussi ne répond pas aux objectifs du dialogue. Il est aussi allégué que
cet accord a été signé par la majorité des composantes. Les composantes et
les entités assimilées qui ont pris part au DIC sont au nombre de huit.
Chaque composante et entité était représentée par une personne habilitée à
l'engager juridiquement. En termes clairs, un document accepté par tous
devrait revêtir huit signatures. Or, l'accord-cadre a recueilli plus de
quatrevingt signatures. Si, dans l'hypothèse du respect de l'alliance
Kinshasa - Gbadolite, la paix peut régner dans les territoires que contrôlent
ces deux forces, pourquoi les Congolais des autres territoires n'ont pas
droit de vivre aussi à l'abri des armes ?

L'alliance pour la sauvegarde du dialogue comme  plate-forme devant servir
aux signataires de faire pression pour la poursuite du dialogue pour en
atteindre les objectifs est une alternative qui ne devrait pas inquiéter
outre mesure.

Néanmoins, la forme qu'elle a prise avec des postes ministériels risque de
confirmer et de conforter ceux qui caressent le projet mirobolant de
balkaniser le pays. Or de cette balkanisation, le peuple congolais dans son
ensemble n'en veut pas. Que cette alliance, faute de patience, recourt aux
armes pour obtenir ce qu'elle cherche, installera, dans notre pays, la
conviction que le pouvoir est au bout du canon. Ceci éloignera davantage les
populations à exercer leur libre choix des personnes et des institutions pour
la gestion démocratique du pays. L'UDPS, qui a été longtemps le chantre de la
non violence, en sortira très amoindrie.

L'ASD, en s'installant à Kisangani, y- a-t-il lieu de parler de dédoublement
des institutions ? Le Gouvernement de Kinshasa, tout en ayant une
reconnaissance internationale, n'est pas légitime.





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