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Message au peuple de Bukavu - card Etsou
- Subject: Message au peuple de Bukavu - card Etsou
- From: anb-bia <anb-bia at village.uunet.be>
- Date: Tue, 05 Jun 2001 14:46:17 +0200
Bruxelles, le 5 juin 2001Nous venons de recevoir le Message au peuple de BUKAVU et l'homélie pour l'intronisation de S.E. Mgr Charles MBOGHA comme archevêque de BUKAVU. Les textes ont été composés par S. Em. Frédéric Cardinal ETSOU, archevêque de Kinshasa et
président de la CENC.Veuillez nous excuser le retard et aussi si vous les avez déjà reçus par d'autres chemins....
PAolo ----------------------------- CONFERENCE EPISCOPALE DU ZAIRE PRESIDENCE B. P. 3258 Kinshasa - Gombe Tél. : 34528 - 529 - 530 Message au peuple de Bukavu réuni à l'occasion de l'intronisation de S.E. Mgr Charles MBOGHA, Archevêque de BUKAVU Chers frères et soeurs,1. Depuis la première guerre dite de libération, l'épiscopat congolais a fait des messages d'encouragement au peuple congolais, lequel, depuis lors, endure la souffrance, croupit dans la misère et espère de voir se lever sur lui le soleil de paix et de justice. Ces messages sont contenus dans les textes ci-après:
+ Non à la guerre, oui à la justice et la paix (du 1er novembre 1996, deux jours après l'assassinat de S.E. Mgr Christophe MUNZIMRWA);
+ 'Bienheureux les artisans de paix' (Mt 5,9). Les événements actuels et l'avenir du Zaïre (du 31 janvier 1997);
+ 'Lève-toi et marche'(Ac 3,6) suivi du Mémorandum au Président de la République (du 30 juin 1997);
+ Conduis nos pas, Seigneur, sur les chemins de la paix (cf Lc 1, 79) (du 08 novembre 1998); 'Sois sans crainte ... ' (Lc 12,32). La situation dramatique actuelle et l'avenir de la République Démocratique du Congo (Message fait à Nairobi, le 19 novembre 1999);
+ 'Courage, le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi' (So 3,1 7) (du 13 juillet 2000);
+ Tous, pour les intérêts supérieurs de la Nation (du 2 mars 2001). Nous y ajoutons les deux autres messages suivants:+ Remets ton épée au fourreau (Jn 18,11). Message des évêques catholiques du Kivu publié le 1er octobre 1998;
+ 'Vous êtes tous des frères' (Mt 23,8). Arrêtons les guerres! Message publié à Nairobi le 15 novembre 1999 par les Evêques de la République du Burundi, de la République Démocratique du Congo et de la République du Rwanda.
2. Nous, les Evêques de la République Démocratique du Congo, avons toujours rédigé ces messages dans l'unité d'esprit et de coeur. Nous avons toujours bravé les difficultés, traversé les frontières de plusieurs autres pays, afin de nous réunir. Nous avons ainsi toujours voulu être pour tous un signe clair et sans équivoque de 1'unanimité de notre conviction sur la volonté d'unité du pays dans son intégrité territoriale. Même la présente rencontre, à l'occasion de l'intronisation du nouvel Archevêque de Bukavu, est une expression de la même conviction.
3. Dans ces messages, nous, les Evêques, nous nous sommes toujours sentis solidaires des soucis et des peines de l'ensemble du peuple congolais; nous nous sommes fait les porte-parole des aspirations du peuple confié à notre charge pastorale et qui souffre atrocement; nous avons toujours assumé le rôle prophétique de l'Eglise en exhortant à l'amour de Dieu et du prochain et en dénonçant tout ce qui avilit les enfants de Dieu.
4. Pour rappel, l'essentiel de ces messages peut être résumé en des points que voici:
Non à la guerre, parce qu'elle n'a que des conséquences désastreuses pour le peuple. * Non à la conquête du pouvoir par les armes, parce qu'un pouvoir conquis par les armes finit par devenir oppressif, sinon oppressif, * Non à tout plan ou toute tentative de balkanisation du territoire congolais, parce que nous ne formons plus désormais qu'un seul peuple. * Non au bradage des richesses de notre sol et sous-sol, et des ressources de notre flore et notre faune. * Non à l'ethnicisation des conflits, à l'exploitation des différences qui existent entre nos cultures et à la manipulation de l'idéologie ethnocentrique, parce qu'une telle manipulation justifie la division au sein de la population et exprime la tendance à la domination des uns sur les autres. * Non à la corruption parce qu'elle engendre et soutient l'injustice et les inégalités sociales au sein de la communauté. * Non à tout discours qui, par le mensonge, nous tient en otage, nous plonge dans le règne des ténèbres, de la haine, de la violence et de la mort. * Non à des dirigeants que l'on impose au peuple, parce qu'ils défendent seulement des intérêts étrangers et se mettent au service de l'exploitation des congolais par procuration. * Non à la dictature dune personne ou d'un groupe de gens, parce qu'elle conduit à l'exclusion des uns et des autres du partage équitable des richesses du pays entre tous les fils et filles de ce pays. * Non à la violation des droits humains, parce qu'elle défigure le visage des personnes créées à l'image et à la ressemblance de Dieu.
Dans ces messages, nous disons OUI à tout ce qui suit et le soutenons résolument:
· Nous disons OUI à l'intégrité du territoire national et à l'unité du pays,· Nous disons OUI à l'intégration de toutes les ethnies et tribus qui composent le grand Congo. · Nous disons OUI à un nouvel ordre institutionnel, avec la séparation des trois pouvoirs traditionnels. · Nous disons OUI à la démocratie et à l'avènement d'un Etat de droit, où la Loi constitutionnelle est au-dessus de tous.
· Nous disons OUI à la justice et à la paix · Nous disons OUI au respect des droits humains.· Nous disons OUI à la répartition et au partage équitables des richesses du pays entre les fils de ce pays. · Nous disons OUI à la sauvegarde du patrimoine économique et à son utilisation dans l'intérêt du peuple et de la nation.
· Nous disons OUI à la promotion intégrale de tout homme habitant ce pays.· Nous disons OUI à la coopération bilatérale et multisectorielle dans le respect de la souveraineté internationale de chaque pays et le respect de chaque peuple à son autodétermination. · Nous disons OUI à la paix et aux relations de bon voisinage avec tous les pays qui nous entourent dans le respect strict de la souveraineté nationale.
Chers frères et soeurs,5. Toutes ces exigences restent d'actualité jusqu'à ce jour et nous sommes convaincus que les voies vers une paix durable dans notre pays ainsi que dans toute la région des Grands Lacs sont indiquées dans ces points. Nous sommes tous frères. Arrêtons la guerre, mettons fin à des querelles et des disputes inutiles entre nous. Nous appartenons à la même Patrie. Pensons aux générations futures et construisons un pays resplendissant pour elles. Pour cela, il faut le dialogue entre nous Congolais et la reconnaissance par tous de la souveraineté du peuple sur tout ce qui regarde la destinée de notre pays.
6. Que les politiciens fassent un examen de conscience et que chacun, en toute sincérité, demande pardon au peuple. Qu'ils respectent les aspirations du peuple, afin que s'instaure chez nous un Etat de droit. Qu'ils se rappellent qu'ils devront un jour rendre compte de leurs actes devant l'histoire et devant Dieu. Oui, Dieu qui nous a ainsi tout donné, posera des questions suivantes à chaque congolais: qu'as-tu fait de ton frère et de ta soeur que j'avais mis à côté de toi? Qu'as-tu fait du Congo dans lequel je t'avais placé pour y vivre? Cessons tous de recourir à l'argument des premiers parents, qui au lieu de reconnaître chacun ses torts, s'accusait l'un l'autre afin de se disculper. Nous voulons une classe de dirigeants nouveaux qui mettent les intérêts supérieurs de la Nation avant toute autre chose et qui doivent répondre de leurs actes devant le peuple congolais.
7. Nous, les évêques, sommes heureux de constater que le peuple, malgré les conditions de vie déplorables dans lesquelles il se trouve, maintient vive son espérance. Nous félicitons toutes les personnes, congolaises et étrangères, qui entendent le cri du peuple et qui font ce qu'elles peuvent pour que la paix, la prospérité et le développement intégral soient effectifs dans notre pays. Nous nous souvenons avec beaucoup de révérence de toutes les personnes qui ont sacrifié leurs vies pour la défense des droits inaliénables des nos concitoyens.
8. Dans les limites de sa mission, l'Eglise n'oublie pas les pauvres, les exclus, les négligés, les orphelins, les malades, les opprimés, tous les nécessiteux. Elle restera engagée dans la promotion intégrale de l'homme et de tout homme. Elle est disposée à donner sa contribution dans l'effort de réconciliation des uns et des autres, dans la résolution des conflits et dans la construction citoyenne de la paix. Nous continuons de prier pour l'avènement de la prospérité dans notre pays et nous nous confions à Marie, la Mère de Notre Seigneur Jésus Christ et la Reine de la paix. Que l'Esprit Saint dont nous célébrons la fête aujourd'hui pénètre nos coeurs et nous ouvre à l'amour de Dieu et du prochain. AMEN.
Fait à Bukavu, le 03 juin 01 Frédéric Cardinal ETSOU Archevêque de Kinshasa Président de la CENC ---------- Mot de circonstance à l'occasion de l'intronisation de Son Excellence Monseigneur Charles MBOGHA comme Archevêque de Bukavu Excellences Messeigneurs les Archevêques et Evêques, Messeigneurs, Messieurs les Abbés, Révérends Pères, Révérends Frères, Révérendes Soeurs, Autorités civiles et militaires, Distingués invités, Chers frères et soeurs dans le Christ, Amjambo! Habari gani ? Aksanti sana1. L'Eglise entière célèbre en ce dimanche la solennité de la Pentecôte et en ce 3 juin, la mémoire des martyrs de l'Ouganda, Saint Charles Lwanga et ses compagnons. En ce jour béni, nous nous retrouvons tous dans la cour de cette cathédrale de Bukavu pour participer à la prise de possession canonique du siège archiépiscopal de Bukavu par S.E. Mgr Charles MBOGHA qui était Evêque à Isiro-Niangara. Le Saint-Père, le Pape Jean-Paul Il, dans sa sollicitude universelle, a daigné le transférer le 18 avril dernier à ce siège pour le bien des âmes de cette portion de l'Eglise qui manquait de Pasteur, depuis la disparition inopinée, le 04 octobre 2000 à Rome, de S.E. Mgr Emmanuel KATALIKO, d'heureuse mémoire. Cette joie immense est à nous tous : ce n'est pas seulement l'Eglise particulière de Bukavu qui se réjouit en ce jour, mais toute l'Eglise locale de notre pays, la République Démocratique du Congo, voire même l'Eglise universelle. Nous nous réjouissons de constater que Dieu notre Père ne veut pas laisser son peuple trop longtemps sans pasteur et que, comme le Seigneur Jésus l'avait demandé à ses apôtres, l'oeuvre de l'évangélisation du monde entier continue grâce à l'Esprit Saint qui a été répandu sur eux et qui agit dans leurs successeurs. "Qu'il soit béni le Dieu et Père de notre Seigneur, Jésus, le Christ. Il nous a bénis et comblés des bénédictions de l'Esprit, au ciel, dans le Christ" (Eph l,3). A Lui, la gloire et la louange, dans les siècles des siècles.
Chers frères et soeurs,2. Comme dit la constitution dogmatique du Concile Vatican II sur l'Eglise, constitution intitulée Lumen gentium, " les évêques étant successeurs des apôtres reçoivent du Seigneur Jésus, à qui tout pouvoir a été donné dans le ciel et sur la terre, la mission d'enseigner toutes les nations et de prêcher l'Evangile à toute créature, afin que tous les hommes, par la foi, le baptême et l'accomplissement des commandements, obtiennent le salut (cf. Mt 28,18 ; Mc 16,15-6 ; Ac 26,17-18). Pour remplir cette mission, le Christ Seigneur a promis aux apôtres l'Esprit-Saint, et, le jour de Pentecôte, l'a envoyé du ciel pour que, grâce à sa force, les apôtres soient ses témoins jusqu'à l'extrémité de la terre devant les nations, les peuples et les rois (cf. Ac 1,8 ; 2,l2 ; 9,15) ". (LG, no 24). Oui, à la fête de la Pentecôte, nous faisons mémoire de l'événement grandiose qui avait eu lieu le cinquantième jour après la grande fête de Pâques, la naissance même de l'Eglise, du nouveau peuple de Dieu, et la définition de sa mission. A Pâques, nous avons célébré, dans la joie et l'espérance, la résurrection de Notre Seigneur Jésus d'entre les morts, c'est-à-dire la victoire de Dieu sur les forces des ténèbres, de la vraie vie sur la mort. Ce sont les apôtres qui furent témoins de cette résurrection et ils nous ont annoncé cette bonne nouvelle. Mais pour l'annoncer au monde avec courage, ils avaient reçu l'Esprit Saint que Jésus ressuscité et monté au ciel avait promis de leur envoyer de la part de Dieu.
3. C'est donc l'Esprit Saint qui fait continuer l'oeuvre du salut de l'humanité. Sans lui, les apôtres restaient cachés par peur des Juifs. Avec lui, ils avaient eu le courage de sortir et avaient commencé à évangéliser, c'est-à-dire à proclamer la bonne nouvelle, selon laquelle Dieu avait ressuscité Jésus de Nazareth qui avait été mis à mort. Ce jour-là, l'Eglise était née comme rassemblement de plusieurs peuples et nations sous un seul chef, le Christ Jésus, mais un rassemblement où tout le monde comprenait en sa propre langue ce que les apôtres disaient dans leur propre langue. Le texte de la première lecture que nous avons écouté dit ceci : " Déconcertés, émerveillés, les gens disaient: "Ces hommes qui parlent ne sont-ils pas tous des Galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle? Tous, nous les entendons proclamer dans nos langues les merveilles de Dieu " ". Ce jour-là, la communion et l'unité au-delà des diversités étaient au rendez-vous ; la tolérance et l'acceptation mutuelle entre les peuples, même jadis ennemis, étaient devenues possibles ; chacun était devenu frère de l'autre. C'est cela l'Eglise : une communion de peuples où "il n'y a plus ni Juif ni Païen, il n'y a plus ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme" (Ga 3,28); car tous ne font qu'un dans le Christ Jésus. C'est cette mission que les apôtres ont commencé à remplir et qui doit continuer jusqu'à ce jour: proclamer au monde entier que nous sommes tous frères, que nous avons un seul Père qui nous aime, qui nous appelle tous au salut, qui nous appelle à nous aimer les uns autres les autres, à nous respecter mutuellement, à défendre la dignité des uns et des autres, parce qu'il n'y a plus ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, mais seulement des enfants de Dieu dans le Christ Jésus.
4. Jusqu'à ce jour, l'Esprit Saint est à l'oeuvre pour accomplir cette mission. Il vient au monde entier et partout avec ses dons multiformes, et le tout pour le bien de tous. " Chacun s'exprimait selon le don de l'Esprit " a dit encore la première lecture. Et Saint Paul le confirme dans sa première lettre aux Corinthiens, tout en mettant l'accent sur le fait que le don vient du même Esprit : " Il y a, certes, diversités de dons spirituels, mais c'est le même Esprit " (1 Co 12,4). Il en est de même pour les ministères : il y a "diversité de ministères, mais c'est le même Seigneur; diverses manières d'oeuvrer, mais c'est le même Dieu qui oeuvre tout en tous. A chacun la manifestation de l'Esprit est donnée en vue du bien commun" (1 Co 12,5-7). Dans sa lettre aux Ephésiens, le même apôtre Paul dit: " C'est lui encore qui a donné aux uns d'être apôtres, à d'autres d'être prophètes, ou encore évangélistes, ou bien pasteurs et docteurs, organisant ainsi les saints pour l'oeuvre du ministère, en vue de la construction du Corps du Christ " (Ep 4,11-12). Au sein de l'Eglise donc, tout le monde ne peut pas faire à la fois la même chose.
5. Oui, grâce à l'Esprit Saint, nous devenons tous, comme a dit la deuxième lecture, enfants de Dieu, capables de crier vers le Père en l'appelant: " Abba ". A ce titre nous sommes tous appelés à nous laisser conduire par l'Esprit de Dieu. Se laisser conduire par cet Esprit, c'est, comme Jésus l'avait fait sa vie durant : 1) faire le bien et seulement le bien partout où nous allons et où nous sommes ; 2) s'engager pour défendre la dignité de tout homme, quelles que soient ses origines, sa race ou son ethnie ; 3) se sacrifier pour qu'il ait une vie digne des enfants de Dieu. Dans un pays comme le nôtre, la République Démocratique du Congo, dans une région comme la nôtre, celle de l'Afrique centrale et des Grands Lacs, nous laisser conduire par l'Esprit du Christ, c'est nous investir non seulement comme individus, mais aussi comme communauté, pour ramener : la paix, là où il y a 1 a guerre ; la construction, là où il y a des destructions et des ruines ; la réconciliation et le dialogue, là où il y a des disputes, et des querelles ; la communion et l'unité, là où il y a tendance à la division et à la balkanisation ; le respect des droits humains, là où il y a exploitation de l'homme par l'homme; le respect de la dignité des autres, là où elle est bafouée et niée ; le pardon et la justice, là où il y a esprit d'anéantissement de l'autre et de vengeance ; le partage et la solidarité, là où il y a égoïsme et exclusions ; la vérité qui libère, là où il y a le mensonge qui prend des peuples entiers en otage. Car, comme le dit Saint Paul, " le fruit de l'Esprit est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi " (Ga 5,22).
6. Se laisser conduire par l'Esprit de Dieu, c'est aussi accepter les différents dons que Dieu lui-même fait à l'Eglise en vue de la construction du Corps du Christ. C'est accueillir avec joie ceux que Dieu nous envoie comme évêques, les aider à bien correspondre à la grâce qu'ils ont reçue, celle d'enseigner l'Evangile du Christ avec autorité, insistant " à temps et à contre temps " (2 Tm 4,2) ; celle de guider et administrer les autres membres du peuple de Dieu sur la voie de la vérité, et celle de les sanctifier par les sacrements qui leur montrent et les rapprochent de la miséricorde de Dieu. C'est l'Esprit Saint qui suscite des pasteurs pour que l'oeuvre de l'édification de l'Eglise continue jusqu'à la fin des temps, de générations en générations. Collaborons tous ensemble, frères et soeurs , à cette édification, chacun à son rang et à son niveau, pour que le travail d'ensemble soit accompli dans l'harmonie et la concorde. Chacun et chacune est un élément actif, choisi par Dieu et engagé avec une mission spécifique, au sein de l'Eglise Famille de Dieu, " pour qu'il n'y ait point de division dans le corps, mais qu'au contraire les membres se témoignent une mutuelle sollicitude. Un membre souffre-t-il ? tous les membres souffrent avec lui. Un membre est-il à l'honneur? tous les membres se réjouissent avec lui " (1 Co 12,25-26).
Excellence Mgr Charles Mbogha et cher confrère,7. Nous sommes tous venus parce que vous êtes à l'honneur. Sans aucun doute, tous les membres de l'Eglise se réjouissent avec vous. Il a plu au Saint Père, le pape Jean-Paul II de vous confier la charge pastorale de cet archidiocèse. C'est bien là un honneur pour vous. Mais, c'est depuis 1990 que vous êtes évêque et vous savez certainement ce qu'est un Evêque et le rôle qu'il doit jouer au sein de l'Eglise Famille de Dieu. Nommé d'abord évêque de Wamba le 11 juin 1990, vous fûtes transféré à Isiro Niangara, le 6 décembre 1995. Pendant toutes ces années, vous avez eu l'occasion de vous rendre compte du fait que la charge épiscopale est bien loin d'être un honneur. Comme le dit Lumen gentium, la charge qui vous est confiée par le Seigneur " est un véritable service " (LG, n° 24). Certes, après avoir écouté des membres de l'Eglise, le Pape vous a, dans sa bienveillance, trouvé digne de paître le troupeau de Bukavu; mais, c'est Dieu qui vous a choisi dans son amour miséricordieux. Tout est grâce. Nous souhaitons et nous sommes convaincu qu'avec l'assistance de l'Esprit du Christ et au-delà de vos faiblesses humaines, vous accomplirez votre tâche avec dévouement et sacrifice.
8. Vous êtes sans aucun doute, comme partout ailleurs, appelé à " assurer, en union avec le Souverain Pontife et sous son autorité, la pérennité de l'oeuvre du Christ, Pasteur éternel " (Décret sur la charge pastorale des évêques dans l'Eglise, Christus Dominus, n° 2). Dans votre consécration épiscopale, vous avez déjà été constitué vrai et authentique maître de la foi, pontife et pasteur (cf. Ibidem). Mais ici à Bukavu, le peuple de Dieu qui est confié à votre charge a besoin d'être rassuré de l'amour de Dieu envers lui. En l'espace de quatre ans, il a perdu de vaillants pasteurs, vos prédécesseurs d'heureuse mémoire, S.E. Mgr Christophe MUNZIHIRWA, assassiné ici même le 29 octobre 1996, et S.E. Mgr Emmanuel KATALIKO, mort inopinément le 04 octobre 2000, à Rome, pendant la 12ème assemblée plénière du Sceam. Je demande une minute de silence en leur mémoire. (... ) Que leurs âmes, par la miséricorde de Dieu, reposent en paix ! (Amen). Comme tous vos prédécesseurs, Excellence, particulièrement ces deux derniers, annoncez à temps et à contre temps l'Evangile du Christ et insistez sur le fait que tout homme est appelé à récupérer sa dignité d'enfant de Dieu, parce qu'il a été racheté par le sang du Christ et doit être habité par l'Esprit qui donne la vie.
9. Ici à Bukavu, vous êtes aussi devenu archevêque métropolitain. Déjà de part votre consécration épiscopale, vous participez, en tant que membre du collège épiscopal, au souci de toute l'Eglise et de toutes les églises particulières. Mais en tant qu'archevêque métropolitain, vous allez présider à l'assemblée épiscopale provinciale de Bukavu. Votre sollicitude envers tous les évêques de cette Province sera un témoignage éloquent de la communion qui vous unit. Continuez à travailler de concert pour que l'ensemble des Eglises particulières du Kivu connaisse une nouvelle vigueur et un nouvel essor pour la gloire de Dieu et le salut de tous ceux que l'Esprît a daigné confier à votre sollicitude pastorale. Partagez les joies et les peines de votre saint ministère et prenez des options pastorales communes dans un climat de franche fraternité et d'étroite collaboration afin de paître l'immense troupeau qui est en cette Province. En tant qu'archevêque métropolitain, vous allez également désormais, et conformément aux Statuts de notre Conférence Episcopale Nationale du Congo, siéger au Comité Permanent pour y représenter chaque fois la Province ecclésiastique de Bukavu. Y siégeant déjà comme Président de la Commission Episcopale pour les religieux, nous savons combien votre contribution et votre dévouement sont d'une valeur inestimable. Puissions-nous, grâce à notre communion affective et effective, aborder avec fruit les nouveaux défis qui se posent à notre action pastorale commune à l'aube de ce troisième millénaire de l'évangélisation du monde.
10. Ici à Bukavu, vous êtes aussi à la frontière avec notre Eglise soeur qui est au Rwanda. Avec elle, l'Eglise qui est au Congo vit la communion et la sollicitude ecclésiales au sein de notre Association des Conférences Episcopales de l'Afrique Centrale (ACEAC). Protégez la foi catholique reçue des apôtres dans cette région où certaines idéologies utilisent toute sorte d'astuce pour déstabiliser l'Eglise et ternir son rôle prophétique de défense de la dignité de tout homme. Une culture est, en effet, en train de naître, laquelle culture refuse de voir les bonnes oeuvres accomplies par des chrétiens qui ont écouté et laissé agir l'Esprit Saint en eux. Et ces oeuvres sont pourtant nombreuses ! Cet Esprit vous a été donné pour que vous annonciez, sans peur, mais aussi sans contrainte ni imposition, la vérité du Christ. Insistez sur le fait que nous sommes tous frères, appelés à vivre ensemble dans le respect du droit de chacun à la vie, et à la vie digne des enfants de Dieu, tous et toutes créés à l'image et à la ressemblance de Dieu pour la vie éternelle.
Cher peuple de Dieu qui est à Bukavu,11. Avec vous, nous avons beaucoup souffert de la mort brutale de S.E. Mgr MUNZIHIRWA et de la mort subite de S.E. Mgr KATALIKO. C'étaient des coups durs. Mais n'oublions pas que Dieu vient nous chercher tous pour aller continuer la vie auprès de lui, au sein de la famille qui est déjà au ciel. S.E. Mgr Charles Mbogha, qui prend possession aujourd'hui de ce siège épiscopal, est un signe éloquent que votre situation ne laisse personne indifférent. Dans sa sollicitude, le Pape a jugé important et urgent de combler le vide laissé successivement par Leurs Excellences Messeigneurs Christophe MUNZIHIRWA et Emmanuel KATALIKO, ces vaillants pasteurs. Celui que le Seigneur vous donne aujourd'hui a besoin du soutien de vos prières, de votre collaboration, de votre compréhension et de votre engagement quotidien pour édifier ensemble l'Eglise Famille de Dieu qui est ici à Bukavu. Vous êtes tous des pierres vivantes dont il aura besoin pour que l'oeuvre, inaugurée par le Christ et continuée dans la puissance de l'Esprit Saint par les apôtres et leurs successeurs, porte des fruits en abondance en ce diocèse et dans cette région des Grands Lacs et de l'Afrique Centrale. Des semences et des fruits de cette oeuvre sont déjà là. Imitons l'exemple des Saints Martyrs de l'Ouganda, de la Sainte Bakita, des Bienheureux Anuarite et Bakanja. Ce sont des fils et filles de cette terre de l'Afrique centrale et de la région des Grands Lacs qui nous interpellent à vivre l'Evangile du Christ jusqu'au bout, quel que soit le rang que nous occupons au sein de l'Eglise.
Chers frères et soeurs,12. A la conclusion de la célébration du Grand Jubilé, Sa Sainteté le Pape Jean-Paul Il a adressé à l'Eglise universelle une lettre apostolique intitulée Novo millenio ineunte. Dans cette lettre, le Pape invite tous les chrétiens à s'engager à annoncer l'Evangile avec courage; à contempler le visage du Christ, mort et ressuscité, pour découvrir l'amour infini de Dieu qui aime l'homme créé à son image; à vivre tous les sacrements dans la foi, surtout ceux de l'Eucharistie et de la réconciliation; à mettre en pratique le grand commandement de l'amour. Le pape nous exhorte également à l'unité dans nos familles, dans les communautés sacerdotales et religieuses, dans nos diocèses, dans nos conférences épiscopales et dans toute l'Eglise. Tout cela, afin d'entrer avec sérénité dans le troisième millénaire et affronter dans la foi les nombreux défis qui se posent à nous. Chacun doit exprimer sa foi, non seulement par les paroles, mais avant tout par les actes. Pour l'approfondissement de cette lettre, le Pape avait convoqué un Consistoire extraordinaire à Rome. Ce Consistoire a eu lieu du 21 au 24 mai dernier. Tous les Cardinaux des quatre coins du monde étaient là, réunis autour du Pape. D'un même coeur et d'une seule âme, ils ont insisté sur le témoignage de l'amour. Comme l'a dit Saint Paul, les chrétiens n'ont " pas d'autre dette que celle de s'aimer mutuellement. (... ) L'accomplissement de la Loi, c'est l'amour" (Rm 13,8.10). Oui, " aimer Dieu de tout son coeur, de toute son âme et de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, cela vaut mieux que toutes les offrandes et tous les sacrifices " (Mc 12,33). Avant de nous séparer, le Saint-Père m'a béni; il a aussi béni tous les fidèles de notre pays. Il m'a chargé de vous transmettre ses salutations et sa bénédiction paternelle. Je vais vous la donner à la fin de ce mot.
Excellences Messeigneurs les Archevêques et Evêques, Messeigneurs, Messieurs les Abbés, Révérends Pères, Révérends Frères, Révérendes Soeurs, Autorités civiles et militaires, Distingués invités, Chers frères et soeurs dans le Christ,13. Ce jour est un grand jour pour l'Eglise entière. Cette fête de la Pentecôte de l'an 2001 doit rester gravée dans nos mémoires. Nous y avons vécu l'amour de Dieu pour son peuple, car il a choisi et établi pour lui un pasteur qui le conduira vers des sources de vie. Unissons donc nos prières en faveur de ce serviteur de Dieu que l'Esprit a mis pour veiller sur le siège de Bukavu. Souhaitons-lui bon succès et que chacun fasse tout ce qu'il peut faire pour que le ministère de ce pasteur porte les fruits de l'Esprit. Allons tous de l'avant dans le troisième millénaire avec l'engagement de vivre réellement le commandement de l'amour. Encore une fois, " qu'il soit béni le Dieu et Père de notre Seigneur, Jésus, le Christ. Il nous a bénis et comblés des bénédictions de l'Esprit, au ciel, dans le Christ " (Ep 1,3). AMEN.
Fait à Bukavu, le 03 juin 2001 S. Em. Frédéric Cardinal ETSOU Archevêque de Kinshasa et Président de la CENC
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